Electro-Pop

La famille dysfonctionnelle anglaise la plus célèbre (après les Windsor s’entend) s’avère indéniablement l’affaire du moment, du moins selon la sphère médiatique en place. Leur arrivée chez Domino s’accompagne d’un battage conséquent, au point que le chroniqueur se sent confusément investi d’une mission sacrée au seuil de cette critique. Au péril de rater le coche, et se trouver ainsi tricard pour des décennies. On va donc la jouer comité de rédaction, histoire de partager les risques. Ca y en a certes un album psychédélique, mais au sens toxicologique du terme. Loin de l’esthétique intello/ gnan-gnan de Radiohead, la fratrie Saoudi a décidé de perpétuer son goût pour le glauque, tant sur le plan des thêmes abordés (la prostitution, la psychose du vagin denté, la dèche et la menace nucléaire), que sur celui des orchestrations. Car en bons adeptes du DIY, ce gang de jeunes tronches ravagées (sous les cernes desquelles sourd le masque de futurs SDFs potentiels) ne s’est ici privé de presque rien. Il y a du vintage Blur là-dedans (“Oh Sebastian”, également réminiscent des ultimes Small Faces), mais aussi du Can circa “I Want More” (“Feet”). Ainsi que du Clash en mode “Sandinista” (“When I Leave”), du The Good, The Bad & The Queen (“Bobby’s Boyfriend”) et du Cornershop itou (“Tastes Good With The Money”, avec son groove choral façon T. Rex couvé par Moroder et Visconti, et l’irruption de Baxter Dury sur le pont). Synthés acides, percus indus et beats robotiques chinés chez Kraftwerk s’habillent ici d’orchestrations post-modernes, où se mêlent indifféremment chœurs grégoriens et licks de surf-guitar (“Rock Fishes”). Enfants putatifs du krautrock, de Damon Albarn et de la culture lad, FAT WHITE FAMILY brandit le manifeste grimaçant d’une génération cocufiée par le Brexit. Dépression ou insurrection: camarade, choisis ton camp.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, May 6th 2019

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