Musique classique

Si vous vous représentez l’Islande comme une terre hostile et semi-désertique où coexistent la glace et le feu, et balayée par des vents polaires sous les aurores boréales, ces clichés s’appliquent comme un gant à ce premier album de la pianiste et compositrice du cru Eydís Evensen. À l’exact opposé d’un spectre qui comprendrait à son ultime extrémité “Les Sardines” de Patrick Sébastien et “Tatayoyo” d’Annie Cordy, il émane de ces douze instrumentaux (comme du seul titre chanté) un spleen à la mesure de l’environnement qui les a inspirés. La plage titulaire et conclusive se traduit de l’islandais par “tempête de neige”, et ce ne sont pas davantage “Dagdraumur” (rêve éveillé), “Deep Under” (tout au fond) ou “Brotin” (cassé) qui en égaieront le climat crépusculaire. Tour à tour seule au piano, ou épaulée de violoncelles et de violons comme de cuivres légers, Miss Evensen (qui exerça un temps la profession de mannequin dans la haute couture) exploite pleinement sa formation de concertiste classique, pour délivrer une œuvre dont le romantisme et la mélancolie sont à même de percer jusqu’au tréfonds les âmes les plus endurcies. Sans jamais évoquer directement Brahms, Schubert ou Chopin, Eydís Evensen n’en déploie pas moins les mêmes bouleversants effets, et si vous désiriez vous remémorer la distinction entre le beau et le simplement joli, en voici la cruciale occasion. Une majestueuse et concise splendeur, aussi fascinante que la contemplation de fjords millénaires.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, March 26th 2021

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Eydís Evensen – Dagdraumur (official video):