Eric McFadden: Let’s Die Forever… Together

Bad Reputation
Rock

Attention, coup de cœur assuré! Eric McFadden, l’animal aux 19 CD n’est pas un de ces juniors bourrés de talent qui épatent par leur dextérité et leur fougue. Véritable bête de scène lorsqu’il a une six cordes entre les doigts, l’homme qui peut basculer du blues au hard rock en passant par la plus hispanisante mélodie et dernièrement guitar heroe de la dernière tournée d’un autre Animal, Eric Burdon, s’est posé, a délaissé dans les bas côtés (pour un instant seulement?) ses époustouflants soli de virtuose de la six cordes pour faire dans l’intimiste, une ambiance sonore qui non seulement lui va comme un gant mais qui permet de mettre en pleine lumière les talents cachés du lascar.

Face à celui qui nous avouait basculer sans cesse entre son côté jour et son côté nuit bien sombre, la surprise est de taille et McFadden, le maestro de la gratte, vous offre ici des compos à vous faire frissonner de plaisir et d’émotion. ‘Emotion’: sans doute LA touche qui caractérise le mieux ce superbe, ce grandissime album. L’intro, “Slow Lullaby”, uniquement à la guitare acoustique, vous met direct dans l’ambiance, intimiste à souhait, suivie par un “What’s In My Head” absolument génial où bandonéon et trompette (quel solo, nom de Zeus!) vous enrobent, vous enveloppent, tandis que la voix d’Eric McFadden, grave, chaude et ardente, vous fait déjà frissonner. Le refrain vous est siffloté à la dandy (John Lennon et Bryan Ferry). Sur les titres suivants le miracle se prolonge, avec cette voix aux accents ponctuels à la Tom Waits, comme dans “Did You Hear That Sound?” et ces soli de gratte qui rappellent les albums heavy rock du maître, mais que les ballades comme “Never Go Home” et “Black Holidays” sont éblouissantes, compositions dépouillées, pures, acidulées et belles.

Eric McFadden est passé maître dans tout ce qui peut noicir ou illuminer l’atmosphère de ses morceaux car il en a de la bouteille et des heures de vol: accordéon, trompette… et contrebasse, comme dans “Black Holidays”. Sur “Friend Of A Friend” l’ambiance est à la soirée entre potes, la voix se fait plus légère, calquée sur une guitare acoustique aérienne et des chœurs suaves qui vous amènent à fredonner ce titre, vous aussi. “Practical Friend” nous ramène dans l’ambiance  de “What’s In My Head”, avec trompette et bandonéon… et toujours et encore cette voix grave, profonde, qui vous envoûte, qui vous attire vers les frontières de cet univers bourré de contrastes inclassables.

La suite confirme que Eric McFadden est non seulement un grand gratteux mais aussi un super auteur: “Hole In My Faith” est l’un des moments clefs de l’album: paroles, compo, voix brûlée par le vent chaud, tout fait de cette ballade un des songs de l’année. “Lucky You” est de la même veine, avant que l’électricité ne vienne faire vibrer les cordes à nouveau pour un superbe “Dead Man’s Lullaby”, l’un de ces titres phares qui marquent une année de musique pendant laquelle on s’envoie dans les oreilles des dizaines, des centaines de CD. “Dead Man’s Lullaby” figurera indiscutablement dans mon tiercé de l’année des plus beaux morceaux de zik, toutes catégories confondues. Tout y est, frôlant la perfection, avec en fin de ballade (tendez l’oreille, car c’est finement placé!) cette voix féminine mi-chantée mi-parlée qui vient se calquer sur celle d’Eric.

Quand je pense à ces trucs imbuvables que l’on nomme chansons et que l’on matraque sur les radios nationales, je ne peux m’empêcher de hurler à toutes ces oreilles formatées: écoutez, ne serait-ce qu’une fois Eric McFadden sur “Dead Man’s Lullaby”, un enregistrement sincère et émouvant à la fois, à écouter et réécouter sans modération, seul ou avec des potes, en le faisant partager à tous les inconnus de passage.

Un monument que ce ‘Let’s Die Forever….Together’, un monument!!!!

Frankie Bluesy Pfeiffer
Chief editor – PARIS-MOVE