ELVIN BISHOP’S BIG FUN TRIO – Something Smells Funky ‘Round Here

Alligator
Blues

Au bout de plus d’un demi-siècle de carrière, Elvin BISHOP pourrait se contenter du statut d’icône qui lui revient de plein droit. Ne prit-il pas part à cette révolution qui, au mitan des sixties, vit de petits Blancs se mêler à leurs cousins noirs pour propager le blues électrique de par le monde? Aux côtés d’un autre géant des six cordes, le regretté Mike Bloomfield, il propulsa le Butterfield Blues Band au firmament, au fil de joutes épiques qui laissaient le public d’alors baba. Tandis qu’il eût pu briguer le même rang de guitar-hero que son alter-ego, ce brave Elvin préféra se concentrer sur le songwriting, privilégiant dans ses performances bonne humeur et secouage de popotin. Indécrottable optimiste, il délivre à présent son vingt-et-unième album studio, tandis qu’il en compte au moins six autres en public. Comme l’indique l’appellation collective de ces joyeux drilles, ce trio n’a qu’un seul objectif: prendre et transmettre du bon temps. Car le Big Fun Trio n’est que cela: avec pour seul soutien un batteur sans baguettes assis sur un cajon, et un flamboyant pianiste barrelhouse, la slide étincelante d’Elvin BISHOP n’a rien perdu de sa fluidité ni de son mordant, comme en témoignent les covers de “Another Mule” de Dave Bartholomew, du “(Your Love Keeps Lifting Me) Higher And Higher” de Jackie Wilson, et du “I Can’t Stand The Rain” de Don Bryant et Ann Peebles. Le pianiste Bob Welsh s’en donne à cœur-joie sur le trépidant instrumental “Bob’s Boogie”, et le frénétique “Stomp” réveille le souvenir d’un autre trio émérite: les regrettés Houserockers de feu Hound Dog Taylor. Seul slow number de cette rondelle, l’ironique “Looking Good” est un talkin’ blues soutenu par un piano évoquant avec brio Otis Spann, au fil duquel Elvin BISHOP évoque avec humour (et licks de slide fumante) les aléas de l’âge. C’est avec l’accordéon d’André Theirry que nos amis referment sur le mode zydeco ce disque réjouissant, avec une reprise du “My Soul” des Hawkins Singers.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder