ELIZABETH COOK – Aftermath

Agent Of Love Records / Thirty Tigers
Pop
ELIZABETH COOK - Aftermath

Il n’existe que deux manières d’aborder ce genre de disque. Soit vous régurgitez servilement les communiqués de presse qui vous sont généreusement distribués, soit vous rendez compte du truc avec toute la subjectivité dont vous vous sentez armé. Car on se trouve ici à nouveau en présence du nième avatar de l’album post-désintox de l’une des nièmes victimes du media system anglo-saxon. Passé les remous d’un divorce retentissant (remontant tout de même à 2010), la vedette télé-réalité/ radio/ David Letterman/ Grand Ole Opry Elizabeth Cook se trouve donc dans la position des toxic-twins d’Aerosmith au tournant des nineties: tout neurone cramé et toute inspiration bue, mais néanmoins riche d’une tabloïd-story suffisamment croustillante pour postuler au titre suprème de fame casualty dont Amy Winehouse a dernièrement explosé les records (précédemment détenus par Kurt Cobain). Les gossips se repaissant de l’odeur du foutre, du sang et de la cocaïne mêlés, les charognards du show-biz savent bien quel profit en tirer auprès des concierges qui ne sommeillent jamais que d’un œil en notre Ford intérieure. Dommage, car avec sa slide et son beat chaloupé, “Bayonette” (jeu de mots délibéré envers le jambon?) n’aurait pas déparé la set-list du Little Feat résilient des années 2000, s’il n’était la production foncièrement putassière de l’abominable Butch Walker, déjà coupable d’avoir lardé des produits aussi manufacturés que Weezer, Green Day et Taylor Swift. S’il n’était le zèle laborieux de ce larbin roué, des originaux tels que “Stanley By God Terry”, “Half Hanged Mary” et “Thick Georgia Woman” auraient sans doute pu ressembler à autre chose que du Kylie Minogue en roue libre courant après sa queue (!), mais trop de pro-tools, de synthés pourris (pléonasme) et de click-beats gâchent ici la sauce, au point de rabaisser l’ensemble au pénible pensum apparemment recherché. Perles surplombant in extremis ce fumier sous air conditionné, “Two Chords & A Lie” et le proprement renversant “Mary, The Submissing Years” (digne de Kris Kristofferson, tout de même) rappellent avec une ironique cruauté que la môme Elizabeth Cook lorgnait initialement plutôt vers Lucinda Williams que Sheryl Crow. Pour le reste, on souhaitera à cette pauvre fille égarée entre les narcoleptiques et les record executives ineptes d’en émerger un jour plus ou moins sauve et consciente. Elle pourra alors prononcer en toute légitimité les mots de cette blague à propos de Bob Marley et des Deadheads sortant de cure: “Mais c’est quoi, cette musique infâme?”.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, November 12th 2020