Dr ALBERT FLIPOUT’s ONE CAN BAND

Don't You Call My Name (Autoproduction / Merlin's Music Box)
Blues

Sous ce singulier sobriquet de Dr ALBERT FLIPOUT’s ONE CAN BAND se cache en fait le bluesman héllène Mickey Pantelous. Lequel s’est inventé pour alter ego (et mentor !) une simple boîte de conserve emplie de gravillons, dont il s’accompagne sur scène en la ligotant à sa cheville gauche, tout en maltraitant une copie Telecaster ainsi qu’un occasionnel harmonica. Voici déjà son troisième album en près de dix ans, et autant dire que tout ceci sonne davantage comme ce que R.L. Burnside produisit chez Fat Possum plutôt que comme n’importe quel autre conservateur de musée. Boogie rustique dès la plage d’ouverture, on ne peut s’empêcher de lui trouver un cousinage avec notre one-man band compatriote Philippe Ménard, avec lequel il partage (outre sa mono-polyvalence à la Rémy Bricka) une inclination celtic-country blues acoustique façon Rory Gallagher (“Don’t You Call My Name”, “It Was Spring When I Met You”). Plus surprenant, “Joyce” et “Under The Blanket” lorgnent vers le phrasé (et le riff) du “Sweet Jane” de Lou Reed, ce qui en fait deux des plus inattendus rejetons du Velvet – en tout cas, les plages les plus proches sur cette rondelle de l’idée que l’on peut se faire d’un hit indé ! Une inspiration meurtrière et suicidaire hante les lyrics (l’impayable “Then I Shot Myself”, ou encore “Hanging From The Ceiling”, qui ouvre les réjouissances). Reflet acerbe de la désespérance ambiante dans son pays (si une contrée d’Europe mérite d’avoir le blues, c’est bien la Grèce), comme en attestent les jouissifs “Free The Markets Slave The People” et “Hell Surfer”. Bref, une vraie personnalité iconoclaste, un peu l’équivalent de ce zozo de Jeffrey Lewis pour feu la scène anti-folk de New-York. Ne termine-t-il pas ce disque par une pochade à la manière de l'”Alabama Song” de Brecht-Weil (“The Woman With The Beard”) ? Un véritable talent de conteur, au service de paraboles tour à tour profondes et foutraques (les textes sont imprimés au dos du poster inclus). Personnellement, je prends !
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
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