Disco, Funk |
L’année est 1978. Avec son “Love To Love To You Baby”, Donna Summer (cornaquée par le proxénète munichois Giorgio Moroder) domine les charts disco depuis des mois, lançant à ses prétendantes le défi de se risquer au même niveau scabreux de doublage porno. A Brooklyn, une autre Donna, elle aussi maquée par des producteurs hystérisés par l’appât du gain, accepte de relever le gant proctologique en se lançant à son tour dans la simulation orgasmique exacerbée. Il faut se souvenir qu’à l’époque, même les Rolling Stones se prêtaient à ce genre de simagrées, qui ne reflétaient rien de moins que l’angoisse sexuelle de nouveaux riches envapés de coke dans les toilettes du Club 54. Comme tout ce qui est rare est cher, l’album que produisit alors cette Donna de substitution pour le label Red Greg Records est devenu depuis l’objet d’un culte comme seuls les collectionneurs et les invertis peuvent en susciter. Il faut se remémorer que le funk (version déjà dévoyée de la soul des sixties) galopait alors après un wagon disco en passe d’entamer le tunnel robotique des eighties, et que l’appel du tiroir-caisse amenait des margoulins de tous bords à ratisser le backyard des would-have-beens que les précédents engouements des discothèques avaient laissés pour compte. Quarante ans plus tard, Prince, Raphael Saadiq et George Clinton étant eux-mêmes passés par là, le temps de la réhabilitation semble venu pour certains de ces seconds couteaux. On repêchera de ce marigot la reprise du “It Ain’t No Big Thing” de Personal Touch pour son groove crapuleux (en dépit de ses synthés zinzinants). Pour le reste, avec ses soupirs, gémissements et œillades salaces de circonstance (ainsi que des zicos empruntés au générique de “La croisière s’amuse”), un album à l’efficacité éprouvée parmi les divers établissements de Dodo la Saumure: recommandé aux couples à la libido en jachère.
Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
PARIS-MOVE, October 26th 2019