Dixiefrog presents ‘Black & White’ by Art Rosenbaum

Dixiefrog – Harmonia Mundi
Blues

Document que l’on peut qualifier d’historique, ce CD ‘Black & White’ vous emmène dans le sud profond des Etats-Unis, à la rencontre de tous ces musiciens amateurs, noirs et blancs, unis dans la même pauvreté et qui, chacun de leur côté, ont jeté les bases de ce qui est devenu la musique américaine. Ancien professeur d'art de l'Université de Géorgie, mais aussi peintre et musicien, Art Rosenbaum, en digne successeur d’Alan Lomax, a consacré 50 ans de sa vie à dénicher et enregistrer sur place tous ces musiciens amateurs, démontrant que la musique a souvent permis de s’affranchir des barrières raciales et que les musiciens blancs et noirs se sont très tôt mutuellement influencés. Son œuvre fut (enfin, diront certains) récompensée en 2008 par le Grammy Award de ‘Best Historical Album’.

Né à Ogdensburg, New York, en 1938, Arthur Spark ‘Art’ Rosenbaum a été élevé à Indianapolis et a étudié l'art à l'Université de Columbia avant de venir à Paris en 1964-65 comme titulaire d'une bourse d'études Fulbright. Par la suite, il a enseigné à New York et dans l'Iowa, puis à Athens (en Géorgie, où il vit actuellement) à partir de 1976. Parallèlement à cette activité d’enseignant, et souvent accompagné par sa femme, Margo Newmark Rosenbaum, une photographe professionnelle, il a consacré tout son temps libre à dénicher et enregistrer des musiciens amateurs noirs et blancs pour en être la mémoire.

Ces dernières années, Art Rosenbaum a décidé de porter à la connaissance du public ces trésors accumulés depuis tant d'années en extrayant de centaines d'heures d'enregistrement la matière de deux coffrets de CD intitulés ‘The Art of Field Recording: 50 Years of Traditional American Music’ proposant également des photos, dessins et biographies d'artistes, pour la plupart inconnus. Publié par le petit label d'Atlanta Dust-to-Digital créé et dirigé par Lance Leadbetter (40 ans plus jeune qu'Art Rosenbaum), ce travail de titan, souvent et justement comparé à la légendaire ‘Anthology of American Folk Music’ d'Harry Smith, a obtenu en 2008 le Grammy Award du meilleur enregistrement historique.

L’album que nous propose Dixiefrog présente une sélection d’enregistrements extraits des deux compilations ‘Art of Field Recording – Vol. 1 & 2’ publiées sous les couleurs du label Dust-to-Digital. Les 24 plages retenues mettent en relief le double héritage africain et européen des musiques traditionnelles américaines. Certains titres, à l’image du ring shout ‘Jubilee’ de Lawrence McKiver et des McIntosh County Shouters ou encore de ‘Lord Daniel’, ballade anglaise chantée a cappella par Mary Lomax, montrent que la communauté noire et l’Amérique populaire blanche ont parfois su préserver l’intégrité de leur héritage. Mais il s’agit cependant d’exceptions, la masse des enregistrements recueillis sur le vif depuis plus d’un demi-siècle faisant apparaître des échanges extrêmement féconds entre les uns et les autres, comme le prouvent ce ‘Bowles’ Blues’ de Eddie Bowles, la fameuse ballade de ‘John Henry’, chantée ici par Mose Parker, ou ce ‘Going Down The Road Feeling Bad’des Golden River Grass, avec un remarquable John ‘Doodle’ Thrower au chant et à l’harmonica.
Parmi les autres grands moments de ce superbe opus, je retiendrai le tout premier enregistrement du CD, celui de Henry Grady Terrell, et ce ‘Guitar Pete’s Blues’ de Guitar Pete Franklin.

Un CD à valeur historique certaine, mais qui ravira également tous ceux qui veulent découvrir d’où vient toute la musique que l’on aime, car elle vient de là… Elle vient du blues.

Frankie Bluesy Pfeiffer
Paris-Move, Blues Magazine (Fr), Blues Matters (UK)
Dixiefrog