Soul |
En dépit de son extraction mexicaine, de sa naissance texane à Houston et de son actuelle résidence à Austin, David Ramirez échappe à la plupart des clichés qui s’y rapportent depuis l’Europe. Son cinquième album en onze ans ne relève en effet ni du blues, ni du rock, ni même de l’americana ou du folk. Pour relater le grand écart émotionnel que lui inspire sa dernière expérience d’une passion amoureuse presque sitôt éteinte qu’elle s’était embrasée, il emprunte en effet les chemins escarpés d’une soul synthétique, avec le soutien assidu du producteur Jason Burt. Bien que basé à Dallas, celui-ci est surtout réputé pour ses collaborations avec des artistes tels que Leon Bridges et John Mayer, et le traitement qu’il applique aux dix compositions de son client rappelle souvent celui qui prévalait aux albums solo de Robert Palmer, quand celui mariait sa propre blue-eyed soul aux prémisses de la pop synthétique vers la fin des seventies. C’est particulièrement saillant sur des titres tels qu'”Easy Does It”, “Shine On Me” et l’envoûtant “I Wanna Live In Your Bedroom”, où les synthétiseurs et machineries rythmiques sertissent d’entêtantes mélodies, sans négliger pour autant l’appel aux sens inhérent à tout rhythm n’ blues qui se respecte. Sur la plage d’ouverture, que transportent des chœurs et claviers quasi-gospel, la performance vocale de David Ramirez évoque même le Jim Kerr des Simple Minds de “Street Fighting Years”. Entre extase et désillusion (“Heaven”, “Hallelujah”, “Love Is Real” contre “Hell, Ft. Sir Woman” et la plage titulaire), Ramirez franchit le Styx auquel nous destine souvent la poursuite d’Aphrodite. Un album d’amant successivement transi et trahi, dont le charme s’exprime davantage à chaque écoute.
Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
PARIS-MOVE, July 2nd 2020