COMPTON & BATTEAU – In California

Earth
Soft rock
COMPTON & BATTEAU - In California

Sur la pochette, l’un est debout, brun et moustachu, sa chevelure bouclée animée par la brise. L’autre se tient accroupi, blondeur diaphane et lunettes de soleil, mais que l’on ne s’y trompe pas: il ne s’agit nullement de l’obscur premier essai du duo Hall & Oates. Depuis le succès phénoménal de la réhabilitation tardive de Sixto Rodriguez par le label Light In The Attic (grâce au poignant biopic “Searching For Sugarman”), une niche semble s’être ouverte pour les archéologues discophiles. Quelques labels se spécialisent en effet de nos jours dans la recherche et l’exhumation de trésors cachés, oubliés, ou ayant malencontreusement glissé entre les lattes du parquet de l’Histoire. C’est le cas de cet unique album d’un obscur duo issu des cendres d’Appaloosa. Originaire de Cambridge (Massachussets), cette formation n’avait publié en 1969 qu’un seul LP, produit chez Columbia par Al Kooper. Outre le chanteur, compositeur et guitariste John Compton, elle comprenait alors le violoncelliste David Batteau (instrument alors peu usité dans les clubs folk, où les deux amis commencèrent à se produire ensemble à la dissolution du groupe). David céda bientôt la place à son frère Robin, violoniste de son état, et c’est ce tandem là, relocalisé près des collines de Hollywood, qui laissa pour tout legs cette galette parue en 1971. “Comme du Cat Stevens avec les arrangements de cordes de Nick Drake”, assène le communiqué de presse. Cette allégation s’applique effectivement à la plupart des titres (les délicats “Laughter Turns To Blue”, “Elevator” et “Homesick Kid”, par la grâce d’un piano à la manière d’un Jean Roussel, ou encore “Silk On Steel” – effectivement réminiscent du “Five Leaves Left “de Drake – ainsi que “Grotto Farm” et cet “Essa Vanessa”, avec son clavecin à la manière d'”Oh Very Young”), tandis que d’autres vignettes à la préciosité surannée évoquent plutôt Crosby & Nash (“Zephyr”), et que le reste (“Honeysuckle”, et le “California” qui intitule l’album) s’apparente plutôt aux premiers efforts de Poco. Rien d’étonnant, si l’on considère que les deux tiers de cette formation étaient de la partie (Rusty Young et Randy Meisner, futur Eagles, ainsi que Jim Messina, ex-Buffalo Springfield, et moitié d’un autre duo à venir avec Kenny Loggins). Compton commit un album solo en 72 avant de disparaître des radars, tandis que les frères Robin et David Batteau enregistrèrent en 73 un album éponyme également réédité depuis. Ce dernier est désormais considéré comme préfigurateur de ce que la critique désigna rétrospectivement sous le terme de “yacht-rock”, ce courant soft-rock/ west-coast FM caractérisé par certaines productions de Jackson Browne, Steely Dan, Christopher Cross, Fleetwood Mac, Toto et autres Doobie Brothers. Rien d’étonnant en somme, pour un disque intitulé “Batteaux”.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, May 20th 2020

:::::::::::::::::::::::::

COMPTON & BATTEAU – In California: à retrouver sur le site du label Earth records, ICI