CHICKENBONE SLIM – Serve It To Me Hot

Vizztone
Rockin' blues
CHICKENBONE SLIM - Serve It To Me Hot

Membre éminent de la scène blues de San Diego depuis trois décennies, Larry Teves (alias Chickenbone Slim) y débuta en tant que bassiste, avant d’opter pour la guitare, quand il se résolut à fonder son propre band, les Biscuits. Après trois albums (“Gone” en 2015, “The Big Beat” en 2017 et “Sleeper” l’an dernier) et plus de 1.500 gigs, la formation se trouva, comme tant d’autres, contrainte à l’hibernation quand survint la pandémie de COVID-19. Il en faut toutefois davantage pour arrêter une force créative de la trempe de celle de Larry, et cette halte forcée lui fournit l’occasion de se concentrer davantage encore sur l’une de ses marottes de prédilection: le songwriting. En effet, si les sets live de Chickenbone Slim incorporent leur inévitable lot de covers, Larry Teves met depuis toujours un point d’honneur à écrire son propre répertoire, condition vitale à ses yeux pour garantir au blues son statut de langue vivante. Avec l’apport du master drummer Marty Dodson (vétéran renommé des circuits roots américains) et de l’immense guitariste Laura Chavez (ex-comparse de la regrettée Candye Kane, et récente partenaire – avec Dodson – du couple Matt et Nikki Hill lors de leurs dernières tournées), ainsi que du bassiste permanent des Biscuits depuis trois ans, Andrew Crane, il est retourné aux fameux studios Greaseland que tiennent Kid Andersen et son épouse à San Jose, où il commence à avoir son rond de serviette. Produits comme il se doit par le Kid en personne (qui y additionne, tel que de coutume, quelques aromates de son cru), ces treize originaux fleurent leur pesant de vintage rockin’ blues, à la manière des early-T-Birds et autres Paladins, qui marquèrent de leur empreinte les clubs des environs. Chavez appose son sceau brûlant à la plage titulaire d’ouverture (parabole culinaire salace de circonstance, dont le boss actuel d’Andersen, Rick Estrin s’avère également coutumier). Le boogie cathartique de John Lee Hooker et Junior Parker s’empare ensuite de “Wild Eyed Woman”, déclenchant un déluge effréné de guitares à têtes chercheuses, dans l’esprit des Red Devils et des frères Alvin à leur apogée. Larry dédie ensuite “Queen Of The Wires” à Laura Chavez, lui rendant l’hommage appuyé qu’elle s’empresse de mériter, en adoptant le style acrobatique et facétieux du jeune Johnny Guitar Watson. Le West-Coast swing local passe ensuite relever les compteurs, pour un “Ought To Be Loved” rappelant les riches heures de Little Charlie & The Nightcats. Faut-il spécifier avec quelle aisance s’y ébat Chavez? Avec son echo- delay, ses tremolos et son tambourin, le mid-tempo “Love To Be True” exhale ces capiteux parfums rétro qui émaillent les B.O. des films de David Lynch et Quentin Tarantino, tandis que le jovial rock “Squares Everywhere” ravive de bienvenues effluves des Blasters, et qu’avec l’harmonica gouleyant de l’invité d’Aki Kumar, “Top of The Clouds” rappelle les incursions swamp-blues de Kim Wilson avec ses Fabulous Thunderbirds. Quand les Biscuits se piquent de tâter du funk sur “Laying In the Weeds”, Kid Andersen leur prête main forte à l’orgue, et tandis que Crane et Dodson s’emploient à y faire groover le bastringue, Teves et Chavez échangent de ces passing shots dont on gratifie plutôt d’ordinaire les gradins de Roland Garros. Le rockabilly attendait son heure, et c’est “Crying Tonight” qui s’y colle, avec la verve de Sonny Burgess et John Fogerty qui auraient potassé leurs Scotty Moore, James Burton et Cliff Gallup. Comme l’indique son titre, “Hey Shakalo” nous embarque ensuite à New-Orleans sur un savoureux second line beat, et l’on s’y surprend à se déhancher dans le French Quarter, au milieu d’une foule aussi emplumée que bigarrée. N’allez pas craindre que Chavez & Co s’y trouvassent dépaysés, tant on les en croirait natifs (Dodson s’y ébrouant même avec une gourmande jubilation). Le languide “I Will Stand For You” bénéficie à son tour des services du Hammond d’Andersen, avant que le double-shuffle “City Girl” ne mette au garde à vous les fans inconsolables des T-Birds, au temps où le grand Jimmie Vaughan y officiait encore. Chickenbone plante le clou final avec un rock n’ roll syncopé digne de Huey Lewis et Delbert McClinton, “Hook Me Up”, criblé de licks (et d’un solo) estampillés Chuck Berry. Fiez vous donc à sa mine pas tibulaire pour deux cents: Chickenbone Slim n’est pas venu pour rigoler.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, October 18th 2021

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