CHARLEY CROCKETT – Lil G.L.’s Blue Bonanza

Thirty Tigers / Modulor
Blues, Country

Sa reprise du “Travelin’ Blues” d’Eddy Owens résume à elle seule le parcours de celui qui se fait appeler Charley CROCKETT (en référence à son prétendu aïeul Davy). Issu d’une famille hautement dysfonctionnelle de San Benito, sur la Gulf-Coast texane, Charley connut très jeune une vie d’errance, se produisant encore adolescent sur les trottoirs de New-Orleans, ou dans les couloirs du métro New-Yorkais. Exposé au mix tejano des radios blues, country et tex-mex (dont Freddy Fender est le dénominateur commun), il ne connait ni n’observe aucune des classifications et étiquettes dont raffolent pourtant les exégètes des musiques américaines. Entre les languides ballades des premiers Tony Joe White (“Here Am I” de Charles Norris, ou “Good Time Charley’s Got The Blues” de Danny O’Keefe), low-down blues (“Trouble Blues” de Charles Brown, “Bright Lights, Big City” de Jimmy Reed ou le “T-Bone Shuffle” d’Aaron Walker) et country-standards entre J.J. Cale et Wayne Hancock (“The Race Is On” de Don Rollins, “Lots Of Luck” d’Eddie Miller, “Servant Of Love” de Norman Walton, “A Dime At A Time” de Jerry Chestnut, “Saturday Satan, Sunday Saint” de Wayne P. Walker ou encore le fameux “That’s How I Got To Memphis” de Tom T. Hall que popularisa chez nous Eddy Mitchell, avec pedal-steel homologuée), Charley CROCKETT adapte à la sauce cajun le célèbre “Burn Another Honky Tonk Down” de George Jones, ou encore “Lead Me On” de Deadric Malone et Lavell White. Que la seule composition de son cru (co-signée Jack Daniels!) s’avère de fait un décalque du “One Way Out” de Sonny Boy Williamson confirme le caractère facétieux de l’entreprise. Il ne faudrait pas pour autant prendre ce disque pour ce qu’il n’est pas: comme Leon Redbone en son temps (ou rencore CW Stoneking de nos jours), Charley CROCKETT ne considère nullement son registre comme une forme de pastiche nostalgique. Ce type VIT manifestement son truc, et c’est ce qui rend cet album aussi addictif que convaincant.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder