CAT POWER sings Dylan: The 1966 Royal Albert Hall Concert

Domino
Folk-Rock
CAT POWER Sings Dylan: The 1966 Royal Albert Hall Concert

Depuis toujours fan éperdue du barde de Duluth, Charlyne “Chan” Marie Marshall (alias Cat Power) n’en est certes pas à sa première reprise de Bobby Zimmerman en près de trente années de carrière. Que ce soit sur les bien intitulés “Covers Record” en 2000 et “Covers” vingt ans plus tard (voire lors de ses propres John Peel Sessions), elle n’a jamais manqué de lui manifester sa déférence. Elle n’en franchit cette fois pas moins un pas conséquent dans cette vénération, en reprenant intégralement la set list du fameux concert que donna son idole le 17 mai 1966 au Free Trade Hall de Manchester, England. Longtemps connu dans les circuits parallèles en tant que “Royal Albert Hall Concert” (en raison d’une méprise dans l’étiquetage de ses bandes), ce gig fit l’objet de multipes bootlegs, avant que Columbia ne se résolve à sa publication officielle en 1998 (“Bob Dylan Live 1966 – The Bootleg Series Vol. 4”). Le culot de Chan rejoint la facétie quand elle se pique de recréer ce concert historique au Royal Albert Hall même (où Dylan se produisit effectivement, les 26 et 27 mai suivants), légitimant ainsi à rebours le mispelling de la performance initiale. Effectivement capté live le 5 novembre 2022 (et non 2023, comme l’énonce le booklet) dans la prestigieuse salle londonienne, ce double CD restitue dans leur ordre originel les 15 titres immortalisés au pinacle de la Dylan mania, quand celui-ci entreprit de se libérer de sa défroque de strict folk protest-singer (dont le carcan l’oppressait), pour s’assumer pleinement en tant que poète éclectique et électrique. Amplement controversé en son temps, cet épisode ne suscite plus tant de polémique de nos jours, et c’est dans une atmosphère fervente et consensuelle que Cat Power en restitue ici les deux temps: le premier CD est donc conformément consacré au set acoustique, et le second à son accompagnement en formation complète (deux claviers, dont un Hammond, deux guitares, dont une électrique, basse et batterie). Simplement soutenue par les six cordes acoustiques de Henry Munson et l’harmonica de Aaron Embry, Chan commence donc par délivrer de poignantes versions de “She Belongs To Me”, “4th Time Around”, “Visions Of Johanna”, “It’s All Over Now, Baby Blue”, “Desolation Row”, “Just Like A Woman” et “Mr. Tambourine Man”. Spectaculairement conformes aux arrangements des versions originales, ces recréations se distinguent toutefois par la passion et l’engagement qu’y consacre la chanteuse. Aussi investie que palpablement émue, la Marshall n’a jamais épousé à ce niveau de sensibilité épidermique le répertoire d’un(e) autre artiste (les tétanisants “Visions Of Johanna” et “Desolation Row”). Bien entendu, le versant électrique de l’affaire (que présente le second CD) prend une tournure différente, et l’on discerne à quel point les accompagnateurs de Chan veillent à y préserver le sound des Hawks de l’époque (alors en passe de se rebaptiser The Band, malgré l’exception notoire du batteur Levon Helm, remplacé par l’éphémère Mickey Jones sur cette tournée européenne, qu’immortalisa D.A. Pennebaker avec son rockumentaire séminal “Don’t Look Back”). L’usage simultané du piano et de l’orgue en accentue la similitude, et la guitare électrique d’Arson Sorrenti y épouse avec bonheur certains maniérismes du regretté Robbie Robertson, récemment disparu (“Baby, Let Me Follow You Down”, “One Too Many Mornings”), tandis que le Hammond B3 de Jordan Summers en fait autant avec celui de Garth Hudson en son temps. Ce volet (par lequel on désigna l’avènement d’un genre que l’on nomma, faute de mieux, folk-rock, avant de le refourguer sous le terme plus générique d’americana) comporte également maints sommets, tels que “Just Like Tom Thumb’s Blues”, “Leopard-Skin Pill-Box Hat”, “Ballad Of A Thin Man”, et bien entendu ce “Like A Rolling Stone” qui ferme le ban en apothéose. Un grand moment de communion, quasi-mystique, entre un répertoire maintes fois sanctifié et l’interprétation habitée d’une artiste intrépide. Il eût été coupable de ne pas en conserver la trace, encore fumante.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, November 8th 2023

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