CASEY HENSLEY – Good As Gone

Vizztone
Blues, Soul
CASEY HENSLEY - Good As Gone

Born and raised in San Diego, Casey Hensley est en quelque sorte la bru que la regrettée Candye Kane n’a pas eu le temps de connaître. Cette jeune chanteuse est en effet la compagne d’Evan Caleb Yearsley, le propre fils de Candye et Thomas Yearsley (contrebassiste historique des Paladins). Pour accentuer encore cette dimension familiale, sa guitariste n’est autre que l’immense Laura Chavez (qui fit partie de l’ultime band de Miss Kane). Et si vous n’avez pas encore saisi le caractère quasi-tribal de l’affaire, ajoutons que son premier album, paru en 2017 (“Casey Hensley Live Featuring Laura Chavez”) fut effectivement capté en public, mais dans le studio de son beau-père à Oceanside, et qu’elle doit sa signature sur Vizztone à l’entremise de Bob Margolin himself (par ailleurs co-propriétaire du label). On voit affleurer les soupçons de népotisme, mais ce spectre se dissipe bien vite à l’écoute de ce premier album entièrement signé de sa plume (le précédent comprenait nombre de reprises, de Big Mama Thornton à Etta James). Outre les fidèles Chavez (qui le co-produit) et Yearsley, on retrouve auprès de Casey Hensley le bassiste Marcos C. et les saxophonistes Jonny Viau et Steven Ebner. Les présentations faites, entrons dans le vif du sujet. Et l’on ne peut mieux dire, puisque cette rousse volcanique y témoigne d’un tempérament de feu! Dès la plage titulaire introductive (un boogie à la Junior Parker), son timbre puissant révèle une shouteuse sans complexe, chevauchant avec autorité le rythme effréné qu’impriment ses complices. Chavez y assène un premier solo à décorner un troupeau de buffles, confirmant si besoin son intime maîtrise du genre. Phrasé, sens de l’espace et dynamique: tout ce qui l’impose en tant que pointure incontournable s’y exerce d’emblée, sans céder pour autant à la moindre démonstration superflue. Dans une veine à équidistance entre Magic Sam et Otis Rush, le mid-tempo “You Sould Be So Lucky” enfonce le clou. Tandis qu’Evan Caleb tient les rênes fermement calés au fond du temps, Laura y porte une autre estocade décisive: décidément, ce blues-là tient presque autant de la corrida que des douze mesures! Le bourru “If I Pray” renvoie Adèle à ses chères études, et Chavez y prend un solo comme on n’en a plus guère ouï depuis le regretté Paul Kossoff (et l’on se prend à imaginer ce que le Paul Rodgers de Free aurait pu en faire). Les cuivres font ensuite leur entrée pour le jump “Be My Baby (What Do You Say?)”, dévoilant une autre facette de Miss Hensley, entre rockab’ et swing. Tant qu’ils y sont, les saxes appuient le lancinant “Love Will Break Your Heart”, au fil duquel la belle rugit avec la rage qui s’impose. Bien que plus réservée au quotidien, Chavez n’en assène pas moins un nouveau chorus qui cloue l’auditeur au pilori. Le laid-back “Searching For A Man” révèle une Casey soul, à l’héritage quasi-gospel. Le vintage rhythm n’ blues des early-sixties s’invite pour “What’s A Woman To Do”, avec des cuivres et une rythmique dans l’esprit de la Ike & Tina Turner Revue. C’est vers Irma Thomas que lorgne ensuite le slow “Don’t Want It To Stop”, et Casey Hensley s’y démontre capable d’une sensibilité qu’elle avait jusque là réfrénée, pour supplier sans pudeur, mais avec dévotion. Afin de ne pas nous laisser dans le désarroi, elle clôt cette galette sur le rockabilly “All In”, où Chavez semble se résoudre à donner une leçon de Cliff Gallup à Brian Setzer en personne! La révélation d’une étoile montante, avec laquelle il faudra indéniablement compter (et un nouvel exploit à citer au crédit de la grande Laura Chavez).

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, February 29th 2020