| Indie rock |
“You can’t judge a book by looking at the cover“: l’adage se confirme une fois encore! Il a beau être né dans le Missouri rural et être relocalisé à Nashville, le dénommé Caleb “Bones” Owens ne verse pas franchement dans la country. Couramment promu (et auto-proclamé) en tant que fils illégitime de l’indie-americana, l’éclectisme de cet effronté l’exonère de la plupart des étiquettes dont s’abreuvent les exégètes. Que l’on en juge: sur cet album (son troisième depuis 2021), il surfe allègrement entre le Creedence de “Sweet Hitch-Hiker” et “Graveyard Train” (“Old Time Low”, “Radiator Soup”, “My Baby’s Gone”), RL Burnside revampé par Jon Spencer (“Silver Spoon Blues”), les Georgia Satellites (“Come Down To It”, “Talkin’ Loud”), Nirvana (“Before I’m In The Grave”, “Demolition”), Weezer (“Sunday Fix”), Teenage Fanclub (“Pay No Mind”, “Here Is Not My Home”) et Jimmy Reed (“In The Wind”). Décidément, chez Thirty Tigers, l’inspiration du moment s’avère funèbre: le nouveau Josh Ritter (chroniqué ICI) s’ouvre sur “You Won’t Dig My Grave”, et celui de Bones par “Before I’m In The Grave”! Faut vous en remettre, les gars, on sait bien que le système de retraites amerloque est bien en deçà du nôtre, mais tout de même… L’éthérée plage titulaire le voit accueillir le rapper d’Alabama Yelawolf pour un talk-over iconoclaste, la complainte “Don’t Nobody Wanna Be Alone” ressemble à du Arthur Alexander revisité par les Limiñanas, et le conclusif “Time Bomb” à un inédit des Shadows Of Knight. Produit par lui-même (with a little help from Paul Moak), le son de cet album est aussi cru et vintage que celui du “Claw Machine Wizard” de Left Lane Cruiser, tout en furetant allègrement aux quatre vents, à l’image du Guy Forsyth de “Can You Live Without?”. Faut-il en déduire que notre homme ne sait pas exactement vers quoi il se dirige? Plaidons plutôt l’inverse: le sage n’énonce-t-il pas que ce qui compte, c’est le voyage, et non sa destination (Best Western n’est autre qu’une chaîne américaine de motels ayant largement essaimé à l’international)? En attendant, ces quinze originaux n’accusent aucun temps mort, et c’est tellement rare de nos jours que nous vous les prescrivons en gélules (voire en intra-veineuse, mais pas en suppositoires).
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, October 30th 2025
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