BOB MARGOLIN – This Guitar And Tonight

Vizztone / Redeye
Blues

Tout amateur de blues un peu averti connaît forcément Bob Margolin. Ce dernier fut en effet guitariste et lieutenant du regretté Muddy Waters de 1973 à 1980, et s’est depuis attaché à en perpétuer l’héritage et la musique. Né à Brookline, Massachussets en 1949, il entreprit la guitare dès sa quinzième année, pour enregistrer trois ans plus tard avec le groupe psychédélique bostonien Freeborne leur album “Peak Impressions”. Sa première contribution discographique à l’œuvre de McKinley Morganfield fut son “Unk in Funk”, suivi du “Woodstock Album” (avec des membres du Band et Paul Butterfield), soit les deux ultimes que le grand homme livra à son label fondateur, Chess. Margolin le suivit ensuite chez Blue Sky, compagnie de Steve Paul, manager de Johnny Winter (lui-même fan transi de Muddy), au sein d’une dream-team qui incluait alors l’harmoniciste Jerry Portnoy, le légendaire Luther ‘Guitar Jr’ Johnson, ainsi que le batteur émérite Willie ‘Big Eyes’ Smith. Après le décès de Waters (qu’il avait du quitter à contrecœur pour des raisons juridiques, tout en conservant néanmoins son amitié), Bob Margolin connut des fortunes diverses. Signé en 93 chez Alligator, il conduisit ensuite quelques années durant le Muddy Waters Tribute Band (composé de vétérans de son orchestre des seventies), avec lequel il enregistra un album sur Telarc en 96. Co-fondateur avec l’harmoniciste Richard Rosenblatt du label Vizztone en 2007, il y publie depuis naturellement, tout en tenant une rubrique dans le magazine “Blues Revue”. Bien que réputé pour son jeu de slide électrique, Muddy Waters lui avait un jour confié qu’il préférait jouer acoustique (comme en attestent ses albums “Sings Big Bill” de 1959 et “Folksinger” de 1964). Il aura finalement fallu à Bob fêter son 70ème anniversaire pour s’y risquer à son tour, mais l’attente en valait la peine! Sur le mode de son mentor pour la plage titulaire, Margolin décline ici un demi-siècle de pratique de son art, s’appropriant successivement les styles distinctifs de Son House et Howlin’ Wolf (“Evil Walks In Our World”), ainsi que ceux de Skip James, Big Bill Broonzy (“Dancers Boogie” ou l’instrumental “Good Driving Song”), et bien entendu Muddy Waters (“Over Time”), sans omettre d’y apporter sa touche sur le long talking blues “Predator” (où il se remémore certaines anecdotes de sa carrière sur un captivant rumba beat). Jimmy Vivino passe en ami sur la plage d’ouverture, et l’harmonica de Bob Corritore en fait autant sur le bien intitulé “Blues Lover” (dans une veine Sonny Terry/Brownie McGhee saisissante). En neuf compositions aussi personnelles que réminiscentes de ses modèles, Margolin livre un album aussi intense que poignant: ce type a de toute évidence été touché par la grâce.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, October 7th 2019