BLUES CORNER – All That We Are

Autoproduction
Blues-Rock
BLUES CORNER - All What We Are

Il existe au moins deux manières d’aborder ce double CD: la puriste et l’éclectique. Selon la première, l’affaire serait sans doute vite expédiée: ces gusses ne sont en effet pas nés du bon côté de l’Atlantique et du Mississippi, et ça s’entend (ne serait-ce que dans leur accent). On y décèle en outre quelques manifestes effluves blues-rock (ne serait-ce que dans les très ZZ Top “Set Me Free” et “Music Is King” ou ce “Rock N’ Rolling” entre Mitch Ryder et Bob Seger), et certains d’entre ses protagonistes ne peuvent réprouver parfois une certaine tendance à l’épate instrumentale qui sévit lors de jam-sessions tardives dans nos arrière-boutiques d’instruments. Bref, refus catégorique de l’appellation d’origine contrôlée, et au suivant… Sauf que halte-là, parole à la défense: cette histoire débute par une amitié, celle qui lie le guitariste et chanteur Phil Roman à l’harmoniciste et claviériste Seb Oroval. Après un premier album déjà prometteur (“Lonely Mile”, paru en 2024), les deux complices s’adjoignent cette fois le guitariste émérite Bruno Dandrimont (Enzo Enzo, Imuvrini, Michel Sardou, Brigitte Fontaine, Christophe Maé…), ainsi que quelques guests de première bourre (Sonny Landreth, Fred Chapellier et Marco, des Cinelli Brothers), tout en persistant à agréger leur propre gang (Zizou Sadki à la basse, Gael Cadoux et Jean-Luc Leonardon aux claviers, Hubert Motteau et Olivier Baldissera à la batterie, Christophe Dupeu à l’harmonica, Michel-Yves Kochman à la slide guitar et Jean-Yves Lozac’h à la pedal steel) pour un second essai en forme de quinte flush au tapis. Car au fond, qu’est-ce qui doit primer, dès lors que l’on prétend apprécier la valeur de la musique? Je ne vous le fais pas dire: la sincérité. Et sur ce plan, on n’abuse plus des lascars comme Fred Chapellier et Sonny Landreth avec un simple carnet de chèques. Écoutez donc pour vous en convaincre la prestation fumante de ce dernier sur l’imparable “Highway Of Love”, ou celle de celui-là sur “Piggy Bank Blues”. En seize compos originales signées Roman, nos deux lascars réalisent ici mieux encore qu’un rêve: le fantasme américain que poursuivent depuis plus de six décennies nos Johnny, Dick, Eddie, Paulo Personne, Little Bob, Benoït Blue Boy et Bill Deraime. Le même que semble célébrer leur artwork signé Arnaud Léger: la route, les grands espaces, la camaraderie et la liberté. Dès lors, que certains titres doivent davantage à Springsteen (“Train Passing By”, “Four Guys On The Road”) ou Calvin Russell (“Living My Life”, “Our Legacy”) qu’à Muddy Waters importe peu: ces types ne font assurément pas semblant, et c’est l’essentiel. Chapeau, les gars, et comme le chante Margo Price, “don’t let the bastards get you down“.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, December 28th 2025

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