BEN LEVIN – Still Here

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Blues
BEN LEVIN - Still Here

Ses 21 ans à peine sonnés, le pianiste et chanteur de Cincinatti Ben Levin propose déjà son troisième album. Repéré chez nous lors du fameux festival boogie-woogie de La Roquebrou, il est considéré at home comme un jeune prodige (terme qu’il récuse, au regard de la ferveur que requit son apprentissage). Tout en piochant allègrement dans la discothèque paternelle, il eut pour mentor l’un des moguls de la scène locale, le pianiste boogie Ricky Nye. En matière de blues, les aînés ont de tout temps pris leurs cadets sous leur aile, les exemples de parrainages de cet ordre sont foison, mais Ben bénéficia en l’occurrence d’un bonus de taille, puisqu’il commença à se produire dès l’âge de 13 ans dans l’orchestre de son père, Aron. Ce dernier accompagne désormais fidèlement son rejeton au fil de ses propres enregistrements (de même que le fidèle bassiste Chris Douglas et l’excellent batteur Oscar Bernal, conférant à l’ensemble un irrésistible swing). S’ouvrant sur le “Love And Friendship” de Joe Bihari et Alicia Szabo (qu’interprétait Jimmy Witherspoon), revu et corrigé dans la jubilatoire veine louisianaise des grands James Booker et Fats Domino (tout comme “That’s The Meal”, “Please Let Me Get One Word In” ou “Bad Idea”, où s’illustrent également avec brio les six cordes d’Aron), cette nouvelle livraison se répartit entre originaux, qu’ils soient de la plume de Ben ou co-signés avec son père, comme la poignante plage titulaire et “Christmas Rain” (dans la ligne du grand Charles Brown), et antiques standards (tels le “I Wonder What’s The Matter” de Jesse Allen, que signa Dave Bartholomew, “I Can’t Stop It” de Joe Liggins, ou encore “Kissing At Midnight” de Billy Boy Arnold et Syl Thompson, alias Johnson). L’instrumental “Crown Jewel” présente ainsi un dialogue équitable entre les deux générations Levin (révélant si besoin était quel superbe guitariste swing-blues s’avère l’aîné), tandis que le mambo “Her Older Brother” confirme l’amour inconditionnel que porte Ben au Ray Charles des fifties. D’une couleur toujours aussi vintage, et d’une inspiration se déployant plus que jamais entre les années vingt et cinquante du siècle dernier (ainsi qu’entre Saint-Louis, la Californie et New-Orleans), cet album témoigne de l’autorité croissante du chant de notre jeune premier, ainsi que d’une virtuosité pianistique plus dévolue que jamais à la recherche d’authenticité qu’à la démonstration stérile (comme en atteste le renversant “I’m Your Essential Worker” final, entre Roosevelt Sykes et Memphis Slim). Sans doute son meilleur effort à ce jour (et s’il s’agit effectivement d’un mix en mono, comme semble l’indiquer sa jaquette, il y subsiste alors un sacré relief!).

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, October 17th 2021

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Still Here · Ben Levin (audio video):