BALLAKÉ SISSOKO & DEREK GRIPPER

Platoon / Mad Minute Music
World
BALLAKÉ SISSOKO & DEREK GRIPPER

En Afrique, bien des instruments de musique sont menacés au même titre que tant d’espèces végétales ou animales. Ce n’est toutefois pas le cas sur l’immense territoire de l’ancien empire mandingue, qui englobe de nos jours la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Mali et de vastes régions du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire et du Sénégal. Grâce aux griots (cette caste de conteurs, de chanteurs et de musiciens que l’on appelle là-bas des “djelis”), les instruments mandingues connaissent depuis quelques décennies une véritable renaissance. Les luths et harpes ancestrales y résistent donc encore et toujours à cet envahisseur occidental à six cordes que l’on nomme la guitare. Parmi celles-ci, la plus célèbre demeure la kora, harpe à chevalet montée en calebasse et à 21 cordes (“sept pour le passé, sept pour le présent et sept pour le futur”, dit sa légende). La tradition de cet instrument se perpétue de nos jours depuis le Mali jusque de par le vaste monde, grâce à quelques virtuoses du cru. Ainsi de Toumani Diabaté et Ballaké Sissoko : amis (et par ailleurs cousins), ces deux-là sont également les héritiers de deux géants, qui participèrent en 1971 au disque le plus célèbre de l’histoire de la kora, “Cordes Anciennes”… Derek Gripper est quant à lui l’un des plus grands virtuoses sud-africains de la guitare classique. Qu’attendre de leur rencontre ici proposée? Une joute, un collage, une greffe? Rien de tout cela, car c’est avec empathie et humilité que ces deux cadors (qui se reniflent à distance depuis longtemps) entament une chorégraphie où leurs instruments respectifs se répondent, s’accompagnent et même fusionnent comme par enchantement. Aussi vibrionnantes qu’une eau de source, ces sept plages donnent parfois l’impression que l’un de nos compères cède furtivement le pas à l’autre (“Koortjie”, “Moss On The Mountain”), mais l’ensemble permet surtout d’assister à l’échange jubilatoire entre deux champions. Foin de toute démonstration stérile, c’est à un dialogue improvisé tel qu’en suscite le jazz que nous sommes ici conviés. Et c’est foutrement beau et bluffant…

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, May 6th 2024

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