BACKTRACK BLUES BAND – A Day By The Bay

Gulf Coast Records
Blues
BACKTRACK BLUES BAND - A Day By The Bay

Fondé en 1980, le Backtrack Blues Band s’est imposé depuis comme l’un des piliers les plus constants de l’État de Floride. Baptisée à partir du titre instrumental homonyme de Little Walter par son harmoniciste fondateur, Sonny Charles, la formation accuse pas moins de sept albums au compteur (ainsi que deux DVDs), et s’est produite au fil de son parcours auprès de pointures telles que B.B. KIng, Koko Taylor, Stevie Ray Vaughan, John Lee Hooker, Clarence “Gatemouth” Brown, George Thorogood, The Nighthawks, Buddy Guy, Robert Cray, Gregg Allman, Johnny Winter, Lonnie Brooks, Junior Wells, Robert Cray, Little Milton, Tommy Castro et Lonnie Mack. D’un line-up étonnamment stable depuis deux décennies, le groupe se compose, outre Sonny Charles et le guitariste gaucher Little Johnny Walter (tous deux présents dès l’origine), du guitar slinger et chanteur canadien Kid Royal, ainsi que du bassiste Jeff “Sticks” Davis et du batteur Joe Bencomo. Pour cet album live (et leur premier depuis leur signature sur le label maison de Mike Zito), ils sont renforcés du Hammond B3 du bien nommé Wayne Sharp, ainsi que des chœurs de Latonya Oliver et de Dana Merriweather. Les festivités s’ouvrent sur le jubilatoire Texas-shuffle “Best Friend’s Grave”, où l’on perçoit d’emblée que le dénommé Kid Royal n’usurpe en rien son surnom. Alternant lead vocals et parties d’harmo, le leader Sonny Charles tend la perche au public en lui proposant le chauvin “Make My Home In Florida”. Chicago slow blues par excellence (dans la veine immarcescible de Muddy Waters et Howlin’ Wolf), ce titre s’avère le plus long de la galette, offrant à chaque soliste l’opportunité de briller sous le soleil ardent du Tampa Bay Festival, le 10 avril 2022. Le Kid y démontre qu’il n’a pas pris ses sources que du côté d’Austin (où il séjourna pourtant), mais aussi auprès des Luther Johnson, Jimmy Rogers, Jimmy Dawkins et Buddy Guy du South Side de la Windy City. Et ce qui aurait pu s’avérer un pensum se révèle in fine un tour de force, dans l’esprit de ce que proposait jadis le Butterfield Blues Band, voici un bon demi-siècle déjà. Démarqué du “Help Me” de Rice Miller, “Help Me Just This Time” (où l’harmo de Sonny et les six cordes du Kid se taillent évidemment la part du lion), le confirme ensuite. La section rythmique s’y démontre particulièrement pertinente, dans un registre où l’on distingue aisément les apprentis des maîtres. Pastiche pour sa part du “Caldonia” de Louis Jordan, l’enlevé “Dixie Grill” donne à Sonny l’occasion de bénéficier des chœurs enjoués des two ladies on board, avant de s’envoler avec son instrument pour une bonne rasade de bar-b-q comme l’affectionnait Asleep At The Wheel. L’exubérant Kid Royal n’est évidemment pas en reste, et on n’a aucune peine à y imaginer les mini-shorts en denim se trémoussant au rythme du Lindy Hop. Seule cover du lot, le “Natural Born Lover” de Jimmy Reed propose ce que son créateur fit sa vie durant: un mid-tempo swamp shuffle lascif et obsédant, à même de réveiller les instincts les plus bas (et donc les plus féconds). Wayne Sharp s’y fend d’un solo cinglant, avant de céder la conclusion au Kid. Dans la même veine exactement, le caustique “Rich Man Blues” prend des allures de pamphlet anti-capitaliste au pays des hedge funds: espiègle jusqu’au taquin, le Backtrack!.. Signé et chanté par Royal, le swinging “She Might Get Mad” donne à Bencomo l’occasion de confirmer que le shuffle version jump ne lui pose aucun problème, tandis que Sonny Charles y revendique à nouveau son leadership, et que les choristes s’y déhanchent en rythme. De la plume du même auteur, “Times Is Hard” s’inscrit dans la ligne du regretté T-Bone Walker et de son “Stormy Monday Blues”. Wayne Sharp s’y illustre avec goût, avant que “You’ll Come Back Someday” de Sonny Charles ne ferme le ban sur un up-tempo gaillard, dans la veine du “Little By Little” de Junior Wells et Mel London. Un good time blues record gorgé de soleil, célébrant l’insolente vitalité de vétérans dont la relève ferait bien de s’inspirer !

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, June 11th 2023

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