ANNIE & ROD CAPPS – When They Fall

Yellow Room Records
Folk

Les amateurs de musique sont parfois bardés d’à priori qu’ils érigent en certitudes. J’en sais quelque chose, puisque la simple évocation du terme folk me provoqua trente ans durant des poussées d’urticaire. J’y puis certes objecter quelques circonstances atténuantes, puisque j’ai assisté en 1975 à la Nuit du Folk au Palais Rameau de Lille, pour m’y ennuyer copieusement au milieu des farandoles de babs sapés en laine de yack. Le clash culturel décisif intervint quinze ans plus tard, quand je tentai de décharger mon drum-kit dans la cour d’un estaminet au cœur des Flandres françaises, pour m’y voir menacer de la trique par son gérant en sabots: “C’est un club folk ici, pas de batterie”… Le problème, avec le sectarisme, c’est qu’il tend à devenir réciproque, et je passai les trois décennies suivantes à brandir des gousses d’ail à la moindre velléité un tant soit peu folky dans mon entourage. Feignant d’ignorer le background de certaines de mes idoles (Neil Young, les Byrds, le Band, Buffalo Springfield…), je demeurais rivé à l’Étoile du Berger que figuraient Dr. Feelgood et les Plimsouls, tandis que Chris Wilson faisait son coming-out au sein des Barracudas: bon Dieu, “Song For Lorraine” et “Corrine” (sur leur classic album “Endeavour To Persevere” en 1984), t’appelles ça comment? Annie et Rod Capps se rencontrèrent en 1982, et ont embrassé depuis une bonne part du spectre que les musiques actuelles peuvent proposer (à l’exception toutefois du dub, de l’electro, du metal et du hip-hop). Elle chante avec cette voix de femme-enfant sur laquelle les ans ne semblent avoir nulle prise tout en grattant son banjo, tandis qu’il harmonise aux guitares acoustiques, électriques et à la viole. Ils virevoltent avec la même aisance du bluegrass à la country, et de la musique des Appalaches aux jigs & reels hérités des moors écossais, comme de la three-steps au mambo louisianais. Privilégiant l’interplay, les mélodies et le swing, Annie et Rod Capps composent l’essentiel de leur répertoire, et surtout, ils ont un GROUPE (au sein duquel figure même un batteur). Ceci est leur huitième album, et comme la grande complicité qui y transpire entre les musiciens s’avère contagieuse, jamais l’on ne s’ennuie à son écoute, et l’on n’y ressent pas davantage l’embarras que suscite parfois le versant gnan-gnan du folk à papa. Chez ces deux-là, on ne parle qu’une langue vivante, et foin des grimoires empestant la naphtaline: entertainment guaranteed…!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, September 19th 2019

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