Jazz caraïbéen

Contrebassiste recherché sur la scène Latin Jazz de New-York (que ce soit au sein des Trombeatz, Antonio Hart Quartet, Mike Eckroth Latin Jazz Quartet ou Flavio Silva’s Break Free), Alex “Apolo” Ayala livre son tout premier effort en tant que leader. Profondément ébranlé par le mouvement social que suscita l’assassinat public de George Floyd, il entreprend ici de célébrer ses propres racines Afro-Porto-Ricaines en sept originaux, ainsi que la reprise d’un standard Afro-Caribéen. Assemblant pour l’occasion son propre quartet (dont les saxophones alto et soprano d’Ivan Renta constituent le vibrant porte-voix mélodique), il s’adosse à la richesse rythmique que prodiguent le batteur Fernando Garcia et le percussionniste bomba Nelson Mateo Gonzalez pour déployer ses propres soli habités. Ainsi de la plage titulaire (dont le titre signifie dans sa langue vernaculaire “mémoire d’un lieu oublié“), des contemplatifs “Agosto” et “Ma’ Bendicion”, et des foisonnements percussifs de “Jibaro Negro” et “Bozales”. Alex dédie cet album à sa mère et sa grand-mère (à chacune desquelles il consacre un titre), tandis que la seule plage chantée accueille la vocaliste Anna Louise Andersson. Tressant de sinueuses trames autour desquelles s’enroulent les arabesques du sax, la contrebasse d’Ayala mène une sarabande où elle transpose avec brio une bonne part de ce qu’il met en œuvre en tant que directeur musical de Los Pleneros de la 21 (fer de lance de la Bomba, mouvement phare de la musique porto-ricaine depuis quatre décennies). Le final “Las Caras Lindas” (adaptation libre d’un classique de Catalino “Tite” Curet Alonso) conclut en apothéose cet album d’une haute inspiration.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, March 1st 2022

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