AL BASILE – B’s Testimony

Sweetspot Records
Blues
AL BASILE - B's Testimony

Après seize albums produits par son ami (et ex-employeur) Duke Robillard, le trompettiste, chanteur, poète et songwriter Al Basile s’est piqué de prendre en charge chaque aspect de la réalisation de son nouveau disque. Ce qui implique qu’outre la signature de chacun des titres qui le composent, il en a non seulement choisi les musiciens (quasiment tous des habitués de l’exercice), mais aussi réalisé le mixage et le mastering, et qu’il en a également conçu l’habillage graphique, étendant ainsi la notion de production à celle de complete control… Et il en faut, de l’assurance, pour se passer des talents en la matière d’un Kid Andersen, dès lors que celui figure à votre line-up du moment! Outre le wonder kid de San José (et désormais membre permanent des Nightcats de Rick Estrin) aux six cordes, la bande à Basile comprend donc à nouveau ses ex-comparses (que ce soit au sein de l’amicale des anciens de Roomful of Blues, ou auprès de Duke Robillard) Mark Texeira à la batterie, Doug James au sax ténor et Bruce Bears aux claviers, augmentés de la trompette de Jeff Chanonhouse et de la basse de Brad Hallen (déjà présent sur son “Last Hand” paru l’an dernier). Le tout fut capté cette fois encore dans les studios Lakewest que tient Jack Gauthier à West Greenwich, dans le modeste État de Rhode-Island, éternel vivier pour le blues de la Côte Est. Les festivités débutent sur le second line beat cuivré “Lucky Man”, dans la veine joyeuse et nonchalante qui caractérise le rhythm n’ blues de New-Orleans. Andersen en profite pour signaler sa présence entre deux cocottes rythmiques, au gré d’un solo aussi concis que bien envoyé (et Bruce Bears en fait autant). Tous deux réminiscents de “Thrill Is Gone”, “Don’t Kid Yourself, Baby” et “Would I Do That To You ?” s’ornent chacun d’un solo de cornet de Al, afin de rappeler à bon entendeur quel épatant musicien il demeure sur cet instrument sensible. Faut-il spécifier que la guitare d’Andersen s’y taille une place de choix, dans la ligne inspiratrice de B.B. King? Retour en Lousiane avec “If All It Took Was Wishing” (empruntant sa trame au “Just A Little Bit” de Rosco Gordon), avant un crochet vers la frontière tex-mex d’un Freddie Fender pour le languide “I Got A Right To Be Lonesome”, puis via Dallas pour le cynique et funky “I’m Bad That Way”, suivi de “Up Close And Personal Best”, dans la veine de Freddie King période Atlantic. Ces trois-ci proposent chacun leur solo de cornet spécifique, et il va sans dire que le Kid s’y régale à pasticher le jeu du regretté Texas Cannonball sur le dernier d’entre eux. La sensuelle Shy Perry donne la réplique à Basile sur la soul ballad cuivrée “One Day At A Time”. L’up-tempo post-#metoo “When The Girl Says Yes” poursuit dans la veine sixties soul d’un Arthur Conley, tandis que “I Oughta Be Your Monkey” reprend la trame des Coasters de “Riot In Cell Block #9”, pour en faire un de ces blues cuivrés et crapuleux dont ils détenaient le secret. Le solo du Kid défie à nouveau toute comparaison, tandis que Al y pistonne le cornet comme à la parade. Cet album à la coloration décidément très soul se poursuit avec “It’s Your Pain”, languide mid-tempo dont Otis Redding et James Carr auraient sans doute fait leur ordinaire (avec un Andersen impérial dans le rôle de Steve Copper, génie des six cordes qui énonça un jour que “l’important n’est pas ce que tu joues, mais bien davantage ce que tu ne joues pas”). Louisiana-shuffle dans la lignée de Fats Domino et Dave Batholomew, “Through Thick And Thin” offre à Al Basile une nouvelle occasion de brandir le cornet, tandis que le piano de Bruce Bears y chaloupe comme aurait pu le faire le regretté Dr. John, et qu’Andersen y baguenaude à la manière d’un T-Bone Walker en verve, pour culminer sur un terrassant crescendo d’anthologie. Le “He Said, She Said” conclusif est un mid-tempo shuffle dont les paroles hilarantes résument la thématique de l’album entier, lequel prétend dresser un constat aussi aigu que désabusé des relations hommes-femmes en ce début de millénaire. Sujet intemporel s’il en est, dont le superbe livret décline les moindres détails, au fil des lyrics qui s’y trouvent imprimés. Au final, ce bon Al Basile parvient à se hisser au niveau des meilleures productions de Duke Robillard, tout en pratiquant cette verve satirique dont on ne trouve plus guère d’équivalent que chez Randy Newman. Excusez du peu…

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 22nd 2021

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