AL BASILE – B’s Hot House

Sweetspot Records
Blues

Pilier fondateur du fameux R&B combo Roomful of Blues, le chanteur et trompettiste Al BASILE est demeuré proche de son leader originel Duke ROBILLARD, ainsi que de nombre de ses comparses initiaux. C’est ainsi qu’il figure sur quantité d’albums du Duke, et que ce dernier a produit chacun des seize qu’Al enregistra sous son nom. De fait, comme en atteste “A Man Of Many Blues”, le récent disque de Paul Gabriel, leur fief de Rhode Island est devenu au fil des ans une sorte de repaire mafieux pour la diaspora blues locale. À preuve, si ce nouvel opus de Al BASILE réunit à nouveau le Duke et une partie de son propre band (Mark Texeira aux baguettes, Bruce Bears aux claviers et, fidèle entre tous, Doug James au sax ténor), il a également été enregistré dans le même studio que celui de Paul Gabriel, avec Jack Gauthier à la console. À la différence de son prédécesseur (“Me & The Originator”), qui alternait passages parlés et chantés sur accompagnement musical, celui-ci s’avère plus classique. Il se contente en effet de proposer, sur des lyrics toujours aussi perspicaces, un large éventail des styles auxquels ce bon Al BASILE s’est adonné en un demi-siècle de carrière. C’est ainsi que “Five Roads” emprunte sa touche swamp à Creedence, et qu’avec le Hammond B3 qui en appuie le riff, “Razor Wire” n’est autre qu’un démarquage du “Help Me” de Rice Miller, tandis que “Give Me That Look” lorgne vers T.Bone Walker et Earl Hooker (avec solo de guitare à équidistance de ces deux titans), et que “Looking For A Cookie” et “What Dogs Wanna Do” renvoient au Chester Burnett le plus égrillard (les soli du Duke y épousant alors le jeu nerveux et quelque peu étranglé du regretté Hubert Sumlin). “I See You There” s’inscrit pour sa part dans les pas du “I’ll Play The Blues For You” du grand Albert King (guitare cette fois encore à l’appui). L’irrédentiste profession de foi “I Ain’t Changing” prend la forme d’une de ces mélancoliques ballades soul qu’écrivait le regretté Doc Pomus, au temps où Dion DiMucci et Willy De Ville transformaient les larmes en diamants. Bruce Bears en profite pour s’y fendre d’un solo de piano à émouvoir jusqu’aux plus endurcis brokers de Wall Street. Tant qu’il y est, Al embraye sur plus pathétique encore avec “You Don’t Know Lonesome”. “Talking In A Room” exalte le romantisme marital, et comme au fil de l’album entier, le cornet de ce brave Al y expédie quelques clins d’œil aux étoiles. Puisqu’il en signe par ailleurs les arrangements de cuivres, cet opus, auquel Duke Robillard a porté le même soin qu’aux siens, célèbre bien l’artisanat d’un véritable poète du blues. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir le livret inclus, qui en retranscrit l’intégralité des paroles.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 29th 2019