ABRACADABRA – Shapes & Colors

Melodic,
Electro-Pop
ABRACADABRA - Shapes & Colors

Après avoir lu ma récente chronique du troisième album de Carla Dal Forno (ICI), on pourrait s’attendre, pour Abracadabra, à une descente en flammes selon le précepte arbitraire du “même motif, même punition”… Il n’en sera cependant rien, car en dépit d’une relative similitude quant aux ingrédients et procédés à l’œuvre, le second essai de ce duo d’Oakland (chantier naval situé dans la baie de San Francisco) produit un résultat singulièrement plus roboratif. Les robots ne semblent d’ailleurs pas présenter davantage de secrets pour Chris Niles (basses, synthés, machines) et Hannah Skelton (chant, lyrics, synthés), mais si les premières mesures du “Talk Talk” d’ouverture (sans relation avec le regretté Mark Hollis) pourraient faire craindre la résurgence d’une nostalgie suspecte envers l’âge prétendument doré du Club 54 (où s’élabora la formule paradoxale d’un funk froid et mécanique), la basse de Niles, associée à des percus organiques (bongos, congas et marimbas), ainsi qu’aux scratches de guitares en cocottes et à des steel drums synthétiques, renvoie autant aux Talking Heads de “Remain in Light” qu’à leur avatar du Tom Tom Club. Impression que confirme le ludique “In A Photo”, où les vocals joviaux et mutins de Skelton rappellent ceux du “Heart Of Glass” de Blondie. On comprend d’emblée que ces deux-là ne sont pas venus pour s’ennuyer, et leur créativité éloigne dès lors tout risque de monotonie. Une véritable batterie épaule sporadiquement les beat-boxes sur les proto-dubs de “Swim” et “Impact” (gavés d’echo-delay, de percus plastiques et d’effets rétro-futuristes cheap à la B-52s), qui bénéficient d’une ligne de basse digne, sinon de celles du regretté Aston Barrett, de ce dont Norman Watt-Roy (bassiste du Greatest Show On Earth, puis des Blockheads et de Wilko Johnson) gratifia en son temps le “Sandinista” du Clash. Ces chenapans parviennent même à faire swinguer un shuffle aussi bionique que “Inyo County”, tandis que le hoquetant et claudiquant “At The Zoo” projette même quelques flashes du “Alabama Song” de Bertold Brecht et Kurt Weil (dont les Doors s’approprièrent eux aussi la dimension grotesque en leur temps). La plage titulaire évoque un high-life urbain tel qu’en conçurent Lizzy Mercier et Kid Creole, et l’on songe également à ce que Jacno produisit pour Lio à l’époque d'”Amoureux Solitaires”, ainsi qu’à toute une scène française que le mensuel Actuel désignait alors sous le vocable générique de “jeunes gens modernes” (raies soigneusement sur le côté, oreilles dégagées et vestes cintrées, pour synthés joués le plus souvent à deux doigts). Maintenant que les termes new-wave et post-punk sont en passe d’être aussi ringardisés que ceux de twist et yé-yé, l’hédoniste “Dawn In The Age Of Aquarius” final scelle la réconciliation des sons industriels avec un psychédélisme dont le souvenir persiste à résonner dans la métropole. Pas dégueu, aurait chuinté Gainsbourg…

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, July 28th 2023

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