John Mayall : une légende vivante du blues blanc

par Frankie Bluesy Pfeiffer – Blues Magazine
Mars 2006

C’est avant le concert qu’il allait donner dans la salle Jacques Brel de Mantes La Ville que nous avons rencontré John Mayall. L’œil toujours aussi vif à 70 printemps passés, les cheveux argentés coupés courts, John nous a reçu comme à son habitude, avant la traditionnelle séance de dédicace de ses CD et DVD qui précède le concert. 

BM : John, depuis toutes ces années on te pose souvent des questions sur tes relations avec Eric Clapton, ou Mick Taylor par exemple. Si je te dis que je ne t’en poserais pas, qu’est-ce que cela te fait ?
JM : Je te dis merci. (silence)

BM : John, tu as écrit de nombreux textes depuis toutes ces années. Où trouves-tu l’inspiration ?
JM : Dans la vie de tous les jours. Dans tout ce que nous vivons, toi comme moi, chaque jour,…

BM : Et quand tu composes, est ce que tu commences par les textes ou par la musique ?
JM : Tout commence avec un sujet que je choisis. Je me mets ensuite à jouer au piano, en pensant à ce sujet, et puis cela dépend de mon inspiration et du sujet, mais souvent je me plonge d’abord dans la musique, au piano électrique.

BM : Et ne songes-tu pas, toi aussi, un jour, à faire un album totalement acoustique ?
JM : Non. Je l’ai fait, il y a longtemps, mais je préfère vraiment rester dans mon style électrique actuel. C’est vrai qu’il y a une mode des albums unplugged, mais je ne suis pas intéressé du tout à faire un album comme cela. Et surtout pas seul, parce que je suis quelqu’un qui aime jouer dans un band, et je ne vois pas ce qui pourrait m’intéresser à jouer seul.

BM : Tu as enregistré en 67 un album solo, The Blues Alone, dans lequel tu jouais pratiquement tous les instruments. N’es-tu pas tenté à nouveau par ce genre d’expérience ?
JM : Non. (silence) Non, parce que comme je te le disais, je me sens très bien dans un band, et….ce qui est passé est passé. Ce qui m’intéresse le plus c’est de travailler sur le prochain album, pas de revenir sur ceux qui sont passés.

BM : Sur scène, on te voit jouer de moins en moins souvent de la guitare. Pourquoi ?
JM : Parce que les Bluesbrakers ont un très bon guitariste, Buddy Whittington, et que je préfère jouer du piano et de l’harmonica.

BM : Tu as vu et vécu toute l’évolution du disque, depuis les 45 tours jusqu’aux CD et DVD, en passant par les 33 tours. Comment vois-tu l’avenir du support musical et le rôle de Internet, notamment?
JM : Tu sais, j’ai bien réfléchi à tout cela, et je pense que quoi qu’il arrive, les gens aimeront toujours avoir de beaux disques et de beaux albums sur une étagère ; pour les toucher, pour les regarder aussi. C’est comme pour les livres. Internet n’a pas remplacé les livres, et je ne connais personne qui jette ses vieux livres pour les remplacer par…, par quoi d’ailleurs ? Non, je suis sûr que même si nous connaissons encore des évolutions de ces supports, comme le numérique, les gens chercheront toujours un support physique pour écouter de la musique,…et se faire dédicacer un album ! (large sourire)

BM : Si tu ne devais retenir qu’un album de toute ta discographie, lequel ce serait ?
JM : Le prochain.

BM : Qui aimerais-tu avoir comme invité sur ce prochain album ?
JM : Je l’enregistrerai avec les Bluesbrakers, et je n’inviterai personne. Si quelqu’un veut venir, alors il viendra et pourra se joindre à nous. Albert Collins l’a fait, beaucoup d’autres l’ont fait dans le passé et ils savent tous que c’est toujours comme ça que cela se passe avec moi ; c’est à ceux qui le souhaitent de venir, et pas à moi de les inviter. Quelqu’un m’a demandé un jour de lui faire une liste de tous ceux qui avaient enregistré avec moi. Aucun intérêt lui ai-je dit, il vaut mieux que tu écoutes notre musique.

BM : Une leçon que tu pourrais tirer de toutes ces années : est-il plus difficile pour un blanc de jouer du Blues, que pour un noir ?
JM : Pas spécialement.

Frankie Bluesy Pfeiffer
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