ITW de Katia the Kat

                                           ITW de Katia the Kat

ITW préparée et réalisée par Dominique Boulay
Photos : © Bruno Requentel et © The Kat Blues

C’est à l’occasion du concert que Lucky Peterson a donné à Montmorency, aux Lumières, en janvier de cette année, quelques jours après son mémorable concert du New Morning, que j’ai rencontré Katia. Nous avons discuté musique et elle m’a tout d’abord parlé de Boney Fields puis de Lucky Peterson…

BM : Chouette manière de fêter ses quarante printemps que de sortir un premier album de 12 titres. A quel âge es-tu tombée dans la marmite?
Katia
: Enfant, je chantais sur ma balançoire, pendant des heures. C’est ma corde à sauter qui jouait le rôle du micro, la ficelle faisant office de câble. J’accompagnai même des personnes âgées de notre voisinage à l'église ou au temple, le dimanche matin, pour chanter dans les chœurs. Plus tard, à l'école, lorsqu'il manquait un prof, je montais sur l'estrade et proposais à la classe de chanter avec moi du Ray Charles ou d’autres artistes… Bref, je crois bien avoir toujours chanté!

BM : Tu as commencé par étudier la musique dans ton sud natal. As-tu eu l’occasion d’aller dans les grandes manifestations musicales qui s’y déroulaient?
Katia
: L'association ‘La voix du blues’ a vu le jour en 1998 et auparavant elle s’appelait Blues Passion. Je me trouvais bien sûr sur les lieux, soutenant Phil Bluesville et sympathisant avec Bill Thomas avec qui j'ai d'ailleurs repris contact au début de la conception de mon album. C'est le même Phil qui m'invita au concert de Lucky Peterson, cette année là. J'ai par ailleurs animé et programmé quelques soirées là-bas, forte des contacts que j’avais parmi les musiciens de la région et même de plus loin… Nous n’en étions qu’aux balbutiements de l’affaire, ce n’étaient que les toutes premières scènes musicales du Rouge-gorge. Je collaborais à la communication, fière de l'immense honneur qui m’était fait que d'avoir été choisie pour présenter au public ce lieu magique lors de son inauguration! Multipliant mes activités d'organisatrice de soirées, de chanteuse avec les Katia & the Boys et étudiant à la même période à l'Institut Musical de Formation Professionnelle de Salon de Provence. C'est à la fin de cette année d'étude que je pris mon envol pour différentes destinations: Louisiane, New York City, Sydney… En juillet 1999, Lucky Peterson m'a invité à partager les scènes du Rockstore (Montpellier) et du Bagnols Blues Festival auxquels je ne songeais qu'en rêve! J'ai quitté ma région quelques mois plus tard, en essayant toujours de faire concorder mes déplacements sur Avignon avec un concert chaque fois que cela était possible. Entre temps, Michel Laporte avait repris le flambeau, programmant deux concerts exceptionnels par mois, et cela pendant quatre années. Il avait été photographe à ses heures, puis avait eu l’idée de développer plusieurs projets sur la Cité des Papes, dont le premier eu lieur en 1995. Il collabora également avec Gil Gauthier, créateur et organisateur du regretté Bagnols Blues Festival.

BM : Et tu ne mentionnes pas le fameux festival de théâtre d’Avignon…
Katia
: J'ai toujours vécu au rythme des différents événements de ma ville. J’ai été aussi hôtesse du French American Workshop durant de nombreuses années, accueillant les cinéastes, auteurs et acteurs de courts et longs métrages français et américains. J’y retournerai cet été et ‘The Kat is back in town!’, comme le disent Boney Fields et Ron Smyth dans l'intro du titre ‘I'm the Kat’. J’y reviendrai avec mon album et un show très rock dont je ne peux dévoiler que partiellement les couleurs. C’est Jean-Paul Bocaj qui a peint le superbe tableau qui sera notre affiche pour le festival et la jaquette de l'album. Le show s'articulera autour de ‘Kat’, un jeu de mots entre mon prénom, Katia, et ‘cats’, qui est le surnom donné aux musiciens jouant dans les clubs américains.

BM : Quelles sont tes principales influences, tes références musicales?
Katia
: Ma mère m'a fait découvrir le son de la trompette très jeune car elle fréquentait des musiciens, elle aussi, comme Georges Jouvin. Et moi, j'ai bien sûr écouté tous leurs albums en boucle à la maison. La première voix qui m'a vraiment fait craquer est celle de la Diva Dinah Washington et c'est aussi la raison pour laquelle j'ai suivi des cours de jazz à l'I.M.F.P. Pour anecdote, je suis allée serrer dans mes bras Junior Mance, cet hiver, le pianiste qui l'a accompagnée durant la majeure partie de sa carrière. Ensuite il y a eu Etta James, qui représente beaucoup pour moi, et c'est son album ‘Let's roll’ qui a sonné le top départ de mon album! Et puis j’aime aussi beaucoup Ray Charles pour ses mélodies et ses rythmes aussi doux qu'endiablés, et Buddy Guy que j'ai croisé lors du Festival d'Enghien, il y a quelques années. Je me rappellerai toute ma vie son regard. J'ai été tellement impressionnée que je suis presque partie en courant. Je m’étais pourtant dit: si je l'approche, je monte sur scène dans les minutes qui suivent et je joue avec lui…! Mais je n’en ai rien fait, car je ne me sentais pas encore prête!

BM : Quels artistes as-tu vu en Live qui pourraient t’avoir donné l’envie, à ton tour, de monter sur les planches?
Katia
: (sans hésiter) Luther et Bernard Allison lors de la sortie de ‘Funk if I know’ au Petit Journal Montparnasse en 1996. J'ai fait la rencontre de Boney Fields ce soir-là. Nous avons beaucoup parlé ensemble et sommes très vite devenus bons amis.

BM : Boney t’a-t-il tout de suite entendue chanter?
Katia
: Non, mais lorsqu'il m'a parlé de concerts au Baryton, un ancien club de Blues de Saint-Ouen, je lui ai tout de suite demandé si je pouvais participer aux sessions, et j'ai immédiatement préparé quelques chansons. Puis j’ai pris un billet de train pour aller voir et écouter ce qui s’y passait. Par la suite, Boney m'a présenté à toutes les personnes susceptibles de m'inviter à venir chanter sur scène avec elles. C'est dans ce club que j'ai rencontré Chelsea pour la première fois. C’est lui, Chelsea, qui a composé ‘Lipstick & Tears’, sur mon album.

BM : Tes nombreux voyages ont dû influencer tes choix musicaux…
Katia
: Mes voyages ont été plutôt initiatiques, dirais-je, dans le sens où ils m'ont ouvert les yeux sur ce qu'allait devenir ma vie. J'ai fait des rencontres magiques, comme les musiciens qui accompagnaient Buddy Miles quand je l’ai rencontré à NY et avec qui j'ai pu jouer, et bien rire aussi. J’ai aussi croisé la route de David Lee Roth tout comme celle de mon ami Marc Hernick, un incroyable batteur. Je me souviens aussi de la Nouvelle Orléans et de ses richesses à tous niveaux. Ca grouille de super ‘cats’, de voix incroyables et de bonnes tables…! A Avignon, j'ai rencontré aussi beaucoup d'artistes, comme Adrian Byron Burns, The Christians, Elton John, Christopher Cross, tout comme la chanteuse et directrice artistique du ‘Singing studio’, Melinda Howard, qui m'invita à la rejoindre à Sydney où elle partageait son pavillon avec l'immense Alan Dargin. A Paris, j’ai fait la rencontre de Jimmy Johnson, en mai 98, qui a accepté de m’emmener dans son autobus jusqu'à Marseille, où j'ai pu assister à son concert! Parmi mes dernières merveilleuses rencontres il y a Peter Nathanson, qui m'accompagnera au festival d'Houlgate, et Kenny Neal, qui a accepté de se laisser kidnapper pour jouer sur deux titres de l'album. Sans oublier Mauro Serri, qui m'a encouragée à écrire de nouvelles chansons! Et je n’oublie pas Christine Ceillier, plus connue sous le nom de Krikriblues, pour son soutien et les nombreux contacts dont elle a le secret! Il y a aussi les rencontres ‘virtuelles’, grâce au net, avec Tom Principato, Charlie Faber et Kevin Bowe, l'auteur de ‘The blues is my Business’, un titre qu'il a écrit pour Etta James et qui a accepté de jouer le jeu en le prêtant à une chanteuse française inconnue. Il m'a d’ailleurs envoyé six autres titres, dont nous avons retenu ‘The Trains’ et ‘Nothing like the Blues’.

BM : Joues-tu aussi d’un instrument?
Katia
: Un peu de basse, oui, mais pas encore assez pour la scène, hélas!

BM : Tu chantes aussi bien en français qu’en anglais. Cela signifie-t-il que tu es toi-même dans les deux langues et que cela n’a finalement pas d’importance, la langue que l’on utilise pour communiquer?
Katia
: Tout à fait…! C'est exact, seule l'émotion suffit pour faire passer un message. Mais il faut bien dire aussi que le choix des textes est également très important.

BM : Boney est Directeur artistique sur ce projet. Est-ce facile de travailler avec un professionnel qui est aussi un copain?
Katia
: Boney est un extraordinaire arrangeur. Il a du goût et il a pris ce travail très au sérieux dès le départ. Il m'a connue au tout début de ma carrière et il sait que j'ai beaucoup travaillé,…et encore plus pour ce projet discographique. Il prend régulièrement de mes nouvelles et a été très fier et surpris d'apprendre que nous passions avant même la sortie officielle du CD sur des radios américaines, italiennes, anglaises et bientôt Françaises,…osons l'espérer.

BM : Tu en es à ta deuxième formation. Tu as commencé avec les Boys et tu continues avec les Midnightsun…
Katia
: La première formation était portée sur un travail d'adaptation de titres français et anglais plus soul, funk, rock et blues. Il y a eu aussi un duo avec Eric Ragu, à la basse et groove-box plus expérimental, avec des reprises teck-groove. J'ai aussi été la chanteuse du big-bang Swing19 durant huit ans, à Paris, dans le 19ème. The Kat and the Midnightsun est une formation plus rock mais on navigue aussi vers d'autres univers grâce aux six auteurs qui ont participé à l’écriture, avec un tout packagé par Boney Fields. Cela donne six compos en français et six titres en anglais, dont un cover de ‘Never felt no Blues’.

BM : Et toi, comment te définis-tu? Blues ou rock?
Katia
: Le rock puisant sa source dans le blues…(silence)

BM : Y aura-t-il autre chose que la musique dans le nouveau show?
Katia
: Oui, dans le cadre du festival on va se faire une joie de théâtraliser notre show. On a pas mal d'idées et un bon nombre d’invités. On va beaucoup s'amuser!

BM : T’inspires-tu de tes propres expériences pour composer ou bien utilises-tu l’actualité, ou je ne sais quoi d’autre?
Katia
: La musique est essentielle pour faire passer des messages. Tous les sujets peuvent, à un moment ou à un autre, servir à tisser une histoire.

BM : Comment s’est passé le travail avec des artistes comme Kenny Neal ou Jean Jacques Milteau?
Katia
: Cela s'est passé très simplement et dans la bonne humeur. Le tout au Studio Wise, avec Ron Smyth, Michael Robinson, Jean Carpenters, Hervé Samb, Alex Soubry, Gérald Renard,… En fait, il y a eu onze musiciens et quatre choristes, tous réunis pour réaliser cette pépite! Et chacun a apporté le meilleur de lui-même pour faire évoluer le groupe.

BM : Tu as déjà été présente sur de nombreuses manifestations musicales dans l’hexagone, mais dans quels autres endroits aimeriez-vous vous produire?
Katia
: Au Cross-Road, avec Clapton. A Chicago, aussi, et dans les différentes croisières musicales, dans les Caraïbes. Dans tous les endroits fameux où la musique bleue est reine.

BM : Ce n’est pas la première fois que Boney passe de l’autre côté du micro…
Katia
: Il a déjà composé et arrangé pour beaucoup d'artistes et il a su donner une belle dimension à ce projet. Il a été enchanté de participer à un projet collectif. Grâce à lui je suis maintenant en possession d'un outil de travail incroyable qui devrait intéresser les producteurs, programmateurs et tourneurs aussi bien en France qu'à l'étranger.

BM : Comment s'est passé ta recherche pour trouver un label, une boite de production, un distributeur?
Katia
: Là, le sujet devient plus cinglant…! J'ai un important distributeur qui serait bien intéressé mais il travaille en partenariat avec des labels qui sont en crise et ne prennent plus de risque avec des artistes indépendants, donc…

BM : Donc tu t’es obligée à faire tous le travail d'une boîte de production?
Katia
: Oui, bien obligée. Quand on démarre en solo, c'est comme ça: la promo, les répétitions, trouver des dates de spectacles et les bonnes personnes pour le contact presse et radio, jusqu'au merchandising. Il faut savoir trouver les ingrédients pour faire prendre le gâteau. Heureusement, je ne suis pas toute seule il y a aussi Patrice, mon manager, sans qui ce serait mission impossible, car j’ai aussi ma petite famille à gérer…

BM : Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de nous offrir pareil album…
Katia
: Le Blues reflète l'âme mais aussi raconte une histoire qui a besoin d'être vécue. Ma voix, aujourd'hui, est plus mature et colle à ce répertoire. Je sais que j’étais attendue depuis longtemps par mon public, surtout dans le sud, mais j'ai beaucoup travaillé avant de sortir cet album, et je pense que les gens ne m'ont pas oubliée. Me voici donc de retour avec la fierté de présenter un bel album qui représente beaucoup pour mon entourage et pour moi! Et je dédicace cet album à tous ceux qui ont eu la patience de m'attendre…

Katia the kat