ITW de John Norum – Europe

ITW de John Norum – Europe

ITW préparée et réalisée par Dominique Boulay
Traduction : Josée Wingert
Photos : © Patric Ullaeus for Revolver.se & Fredrik Etoall

C’est à l’occasion de la sortie de leur nouvel album ‘Bag Of Bones‘ que nous avons eu le plaisir de rencontrer deux membres du groupe de rock suédois EUROPE. L’occasion était belle de pouvoir discuter avec des musiciens à l’origine de succès internationaux tel ‘The Final Countdown’, par exemple, titre qui n’a pas pris une ride et dont l’album figure toujours en bonne place dans de très nombreuses CD-thèques. Deux des membres du groupe, John Norum et Joey Tempest se partageant les entretiens avec les journalistes, j’avais demandé et obtenu à voir John Norum, ayant encore dans les oreilles son album solo ‘Play Yard Blues‘.

Fredrik Etoall

De quelle région de Suède viens-tu?
Je viens de Stockholm. Plus précisément d’un endroit qui n’en est pas éloigné, Tilläsjö, qui est à seulement 15 minutes du centre ville, et je ne suis pas ce que l’on peut appeler un citadin. Je suis près de la mer, entouré de forêts et de nature. La paix, le calme et l’air pur, ce sont des choses essentielles! Et chez moi il n’y a pas trop de voitures et d’embouteillages, ce qui est tout de même très agréable (rire).

Quand j’habitais Stockholm, je résidais à Solna.
Je connais très bien, parce que ma mère habite dans cette ville.

J’avais un appartement dans le Rasundavägen…
C’est amusant, parce que c’est précisément dans cette rue que ma mère habite. Quelle coïncidence!

Et à ce propos, pourquoi aviez-vous choisi de vous appeler Europe?
L’idée était venue de Joey, en fait, qui venait tout juste d’écouter le disque Live de Deep Purple ‘Live In Europe’. Il avait trouvé la musique géniale et il s’était dit que ce nom, Europe, ferait un très bon nom de groupe. Au début je trouvais cela personnellement horrible, et puis j’ai fini par m’y habituer. Surtout quand Joey nous a tous fait écouter le disque.

Qui est le petit garçon sur la cover de ton album solo de 2010, PlayYard Blues?
Il s’agit de mon fils, Jake Thomas Norum. Il joue de la guitare et il n’est pas mauvais du tout. Il doit tenir cela de son père…et de sa mère, Michelle Meldrum, qui était elle aussi une grande musicienne, et une grande guitariste. C’est sûr que mon fils a ça dans le sang. D’ailleurs, pour être précis, sa mère jouait dans le groupe Phantom Blue.

Revenons maintenant à ce nouvel opus. Qui a écrit la chanson My Woman My Friend?
C’est John Leven, le bassiste, qui a composé celle-ci.

Qui est celui qui compose le plus, au sein du groupe?
Tout le monde, à l’exception du batteur, Jan Hauglan. Mais il a de très bonnes idées, par contre, en ce qui concerne les arrangements.

Es-tu es le seul qui mène conjointement une carrière solo et une carrière avec le groupe?
Oui, et de faire les deux à la fois est quelque chose qui me plait énormément. Je trouve que c’est bien de faire quelque chose en dehors du groupe. Quand tu es dans une formation, tu es obligé de faire et de suivre tout le temps ce que décide le groupe. Et même s’il y a quelque chose que tu n’apprécies pas particulièrement, hé bien tu es obligé de suivre les autres, si le reste du groupe l’a décidé ainsi. Au sein de Europe, c’est la majorité qui décide. Si trois des membres veulent faire quelque chose et que les deux autres n’en veulent pas, hé bien on le fait quand même! Tandis que lorsque tu es seul, c’est différent. Quand tu travailles seul, tu ne suis que tes inspirations. Tu prends tes propres orientations, et tes responsabilités. Et puis c’est très intéressant de toucher à tous les aspects du métier, comme la production, le mixage. J’adore ça! Et puis j’ai cette liberté de chanter et jouer comme je le veux. J’aime beaucoup chanter, mais je peux aussi me permettre de faire des soli aussi longs que je le souhaite. Il n’y a personne pour me contester, je suis mon propre maître! Je peux par exemple faire un solo de vingt minutes, si cela me dit, car personne ne m’arrêtera (rire).

Sur la pochette de ‘Play Yard Blues’ tu tiens une Gibson SG. Est ce ton instrument de prédilection, ou bien utilises-tu souvent d’autres guitares?
En général c’est cette Gibson que j’utilise, parce que j’aime ses sonorités. Tu sais, c’est toujours difficile de trouver une guitare qui te convienne, mais une fois que c’est fait, elle est ton amie pour la vie. Et pour moi c’est celle-ci, tout particulièrement.

Tu l’as dénichée où?
Tout simplement. Je suis allé aux Etats-Unis et je me suis rendu dans l’usine Gibson. Là, j’ai essayé une vingtaine de Les Paul, et c’est cette création de 1958 qui m’a séduit. Elle est vraiment particulière. Et j’y suis très attaché. Mais j’aime bien aussi jouer de la Flying V, qui est aussi une très bonne guitare.

Sur ce dernier opus figurent deux morceaux joués acoustique…
Oui, car je joue aussi avec une Gibson acoustique. C’est une guitare qui est aussi très chouette! Et puis je joue aussi parfois avec une guitare Ovation, que j’apprécie également.

Patric Ullaeus for Revolver.se

Où avez-vous enregistré le morceau avec Joe Bonamassa? Et avez-vous rencontré Joe à Stockholm?
Oui, je l’ai rencontré plusieurs fois. Je le connais depuis plusieurs années. Lui et moi, nous sommes dans la même compagnie de disque en Hollande, Mascott Records, pour ce qui concerne ma carrière en solo. Il m’avait invité en ‘guest’ lors de l’un de ses concerts et j’ai fait plusieurs morceaux avec lui. C’était génial…! Tes lecteurs de Paris-Move peuvent les voir sur Youtube, s’ils veulent voir ce que ça a donné, Joe et moi en Live (rires.) Et puis Joe a fait un concert avec nous, l’année dernière à Stockholm, où il a joué également sur quelques morceaux. C’est l’un des meilleurs amis de Kevin Shirley, notre producteur. C’est d’ailleurs lui qui lui avait demandé si cela l’intéressait de jouer un morceau acoustique en slide. Je n’avais jamais joué, moi, en slide acoustique, mais j’étais très intéressé par cette proposition. Kevin m’avait demandé de la faire en slide, cette intro, mais comme cela ne m’inspirait pas vraiment, il m’a dit qu’il allait la proposer à Joe. ‘De quel Joe parles-tu?’, lui ai-je demandé. Et il m’a répondu Joe Bonamassa, bien sûr. Alors que moi, en fait, j’avais le nom de Joe Perry qui m’était venu à l’esprit. Kevin a donc téléphoné à Joe et il lui a proposé de faire ça, si cela l’intéressait. Joe a accepté tout de suite et cela s’est fait tout naturellement.

Et concernant ce Bag of Bones, de quels os s’agit-il?
Le titre du morceau, et donc de l’album, vient de Joe. Et c’est lui qui serait le plus à même de l’expliquer, mais je vais le faire quand même (rire). En fait, Joe enchaînait des accords en chantonnant, comme ça, des mots qui lui venaient spontanément à la bouche, et c’est ‘bag of bones’ qui était le leitmotiv qui revenait le plus souvent. Et cela parce qu’il était revenu tellement éreinté et épuisé d’une tournée, et qu’il se laissait tomber de fatigue là où il le pouvait, comme un vieux squelette, comme un vulgaire tas d’os. C’est de là d’où est venue l’idée de récupérer cette expression pour en faire un morceau (rire).

Le titre ‘Riches to Rags’ n’est-il pas un point de vie philosophique sur la vie?
C’est une chanson à propos de ce qui se passe à Londres où vit Joey. Il est là-bas avec femme et enfant, et la situation tragique que vivent beaucoup de gens autour de lui l’a inspiré, car la crise en laisse quelques uns sur le carreau, tu le sais bien…

Not Supposed To Sing The Blues?
J’aime bien jouer du Blues, évidemment. Mais nous venons de Stockholm et ce n’est pas vraiment l’endroit où l’on s’attend à jouer du Blues. Le British Blues des Clapton, Peter Green ou Jimmy Page, c’était dans les années soixante, et on n’est donc plus censé jouer la même musique qu’eux. Il faut dire aussi que nous n’avons pas le même vécu qu’eux, ni la même approche de la musique de leurs prédécesseurs.

Et pourquoi avoir composé un requiem, une messe des morts?
C’est étrange, c’est comme aller à des funérailles. Parce que c’est presque arrivé comme un accident. 28 secondes! Nous étions en studio et Mic pianotait sur les claviers. Kevin est alors entré en disant: ‘Qu’est ce c’est que ça? C’est beau! J’aime beaucoup, et on peut en faire quelque chose!’. Et c’est comme cela qu’on l’a enregistré.

Il y a pourtant une addition de titres qui fait que l’on se pose des questions: Demon Head, Mercy You Mercy Me, et ce Requiem. Cela concernerait-il une certaine relation avec la religion?
Non, pas vraiment! Pour être franc avec toi, on n’a pas de message religieux à faire passer. Ce sont justes des chansons. Même si chaque chanson a son histoire, son thème.

Qu’est ce que vous avez fait depuis ‘Last Look at Eden’. Cela fait quand même trois ans sans nouvel album. Sans compter les 18 années entre ‘The Final Countdown’ et ‘Start from the Dark’.
Moi, je menais ma carrière solo, et puis nous avons fait des tournées vraiment dingues. On avait quand même eu besoin de faire des pauses. Et puis John, notre bassiste, a été papa. Ensuite, il nous a fallu le temps d’écrire de nouvelles chansons. Tu sais, on a tous eu vraiment besoin de se retrouver en famille après avoir tourné pendant presque deux années complètes. Tu as besoin de te ressourcer. Et puis c’est nécessaire aussi pour les enfants qu’ils retrouvent leurs parents.

Combien de temps pouvez-vous rester sans vous revoir tous ensemble?
Jamais bien longtemps (rire)…! On se revoit toujours très vite après quelques semaines de séparation. Le plus pénible, en fait, c’est pour Joey qui doit faire des navettes entre Londres et Stockholm. Je ne sais pas exactement combien de temps prend le voyage, mais il a dû y passer du temps, dans les avions et les aéroports pour venir nous voir.

Et avez-vous toujours des contacts avec les anciens membres de la formation?
Non. Si tu penses au batteur d’origine, Tony Reno, je ne lui ai plus parlé depuis 10 ou 12 ans. Nos chemins ont vraiment divergé. Et puis tu vieillis, tu as une famille, tu ne sors plus tant que ça. En fait, vois-tu, avec les années qui passent j’apprécie de plus en plus de rester à la maison.

Patric Ullaeus for Revolver.se

Quand démarre votre prochaine tournée?
Nous allons commencer par des festivals qui se déroulent en été, tout d’abord, puis nous irons en Pologne, entre autres, et nous aurons aussi trois dates en France en novembre 2013, au cours de la tournée qui débutera l’automne prochain. Nous irons en Asie, au Japon, à Taïwan, en Amérique du Sud, au Brésil, eu Chili, au Pérou…, et pour finir, nous ferons la Scandinavie. Nous irons partout, sauf aux Etats Unis.

Et quels seront tes projets personnels à l’issue de cette nouvelle tournée presque mondiale?
En ce qui me concerne, je prévois un nouvel album solo pour l’année prochaine. Mais la nouvelle tournée nous occupera quand même jusqu’à la fin 2013. On verra donc ça après…(sourire).

Songes-tu un jour faire quelque chose avec ton fils?
Oui, mais quand il sera un peu plus âgé. Je préfère attendre un petit peu. Il m’a déjà accompagné dans des tournées, mais c’était juste histoire d’être avec son père et pas pour jouer. Nous verrons ça un peu plus tard. Mais c’est vrai que cela pourrait être génial…!

Cela prend du temps, l’éducation d’un enfant…
Tout à fait! Et pour un enfant, la famille c’est quelque chose de très important. Il ne faut pas négliger l’importance d’une famille heureuse pour un enfant.

Que peux-tu nous dire de la scène suédoise d’aujourd’hui?
Franchement, il y a de tout, même s’il n’y a pas beaucoup de bluesmen! C’est plutôt du New Metal ou du Death Metal, ou bien encore de la pop musique typiquement suédoise, mais il y a aussi de bons groupes de rock. Ceci dit, la Suède est un pays où c’est la pop qui l’emporte! Avec des formations qui chantent en suédois.

Je me souviens des groupes rock suédois de la fin des 70’s dont les paroles des chansons ressemblaient à des discours révolutionnaires et d’extrême gauche!
Oui, tout à fait, mais cela n’existe plus depuis longtemps (rire). Et c’est sans doute dommage, parce que j’aimais bien toutes ces formations quand j’étais gamin.

Si tu te souviens, Bob Marley a d’ailleurs fait l’un, voire le premier de ses concerts européens à Gröna Lund , le parc dans Stockholm.
Il y a même un disque qui a été enregistré à cette occasion… ! Mais de nos jours, un même concert dans pareilles conditions ne pourrait plus se faire, pour des raisons de sécurité, car 30 à 40.000 personnes à cet endroit, ce serait de la pure folie! Quand nous avons débuté dans les années 80, nous étions l’un des premiers groupes à jouer ainsi. Et puis cela a pris un essor phénoménal. C’est devenu un phénomène de mode et je ne sais pas pourquoi, c’est vrai qu’en Suède on est perméable à tout ce qui peut se faire.

Est-ce que cela voudrait dire qu’il y a un public meilleur que d’autres?
Pas vraiment, parce que la musique est un langage universel. Mais les réactions d’un pays à l’autre sont différentes. Si tu compares les publics d’Europe avec ceux d’Amérique su Sud, cela n’a rien à voir. Je n’ai jamais entendu un public hurler ici comme je l’ai entendu là-bas…! Au Japon c’est différent, ils applaudissent entre les morceaux mais ils écoutent silencieusement lorsque l’on joue! Et au début, quand tu ne le sais pas, cela fait presque bizarre. Par contre, ici, en Europe, il n’y a pas vraiment de différence d’un pays à l’autre. Les gens ont presque tous la même manière de réagir pendant un concert. Sans doute la fibre européenne. Celle de l’Europe (rire).

Il ne me restait plus qu’à remercier ‘pa svenska’ le guitariste suédois pour sa gentillesse et sa disponibilité et lui donner rendez vous pour son futur concert parisien.

John Norum