ITW de Francis Rossi

                            ITW de Francis Rossi (STATUS QUO)

ITW préparée et réalisée par Dominique Boulay
Traduction : Josée Wingert
Photos : Sylvie Cornu Boulay
Date : le samedi 27 août 2011, à Sierre (Suisse)

C’est à l’occasion du troisième Festival de blues de Sierre, en Suisse, que nous avons rencontré Francis Rossi, membre fondateur de STATUS QUO, légendaire formation de rock anglaise qui fêtera ses 50 ans l’an prochain. Et c’est donc avec un grand plaisir que nous avons pu nous entretenir avec celui qui incarne depuis 1962 l’esprit de ce groupe devenu mythique.

DB : Bonjour Francis, est ce que tu comprends un peu le français, par hasard?
Francis Rossi
: Hélas non, mais je parle italien, si tu penses que cela peut t’être utile (rires).

DB : Quels sont vos projets à l’issue de cette nouvelle tournée mondiale?
FR
: En ce qui concerne la musique, nous en sommes à l’élaboration de nouveaux morceaux. On a également prévu de se rencontrer avec Alan Lancaster et John Coghlan, en novembre prochain, pour travailler sur un documentaire nous concernant. Sinon, dès le mois de février prochain, nous partons pour le Mexique, d’où nous débuterons une nouvelle tournée mondiale (rires).

DB : Où vivez-vous, lorsque vous n’êtes pas en tournée mondiale?
FR
: Moi, je vis à proximité de Londres depuis 1974. J’aime bien cet endroit et…j’aime bien tes lunettes, aussi…(rires)…!

DB : Tu veux les essayer?
FR
: Ha oui, volontiers! Elles sont super, ces lunettes françaises, bien mieux que les miennes. Il faut absolument que je me procure les mêmes (rires)…!

Il invite alors son attachée de presse à ce que nous restions en contact afin que nous lui trouvions ensemble la même monture, lors de son prochain passage sur Paris, pour le concert qui sera donné à l’Olympia en octobre.

DB : Combien de jours, ou de semaines, peux-tu rester sans rencontrer les autres membres du groupe pour jouer ensemble, travailler et répéter vos morceaux?
FR
: Cela pourrait durer une éternité mais comme on doit sans cesse répéter, on ne peut pas ne pas se voir au-delà de trois semaines (rires). C’est vrai qu’en vieillissant on trouve cela un peu plus difficile, mais on y est pourtant obligé. Surtout que l’on va donner des concerts en Angleterre, en Allemagne, en Hollande et en France. Mais, en automne, vraisemblablement courant novembre, nous ferons une pause de cinq semaines. C’est quelque chose d’assez inhabituel, en ce qui nous concerne, mais cela devient de plus en plus difficile de trouver un équilibre entre vieillir et l’aspiration légitime à en faire de moins en moins, et la nécessité de toujours devoir travailler plus pour rester au top. Je ne pensais pas que ce dilemme se poserait à nous, mais c’est pourtant le cas. Il faut se faire une raison.


DB : Avez-vous toujours des relations avec les membres du groupe qui l’ont quitté pour une raison ou pour une autre?
FR
: Comme je te l’ai dit tout à l’heure, nous préparons un documentaire avec Lancaster et Coghlan, et il n’est pas dit que nous ne referons pas un concert ensemble. Les relations existent, et nous continuons à nous donner des nouvelles et à être en contact les uns avec les autres.

(NDLR : Alan Lancaster a été bassiste et chanteur dans la formation de 1962 à 1985, John Coghlan a été batteur de 1962 à 1985, Peter Kircher a tenu la batterie de 1962 à 1985 puis Jeff Rich de 1986 à 2000, et Roy Lynes était au clavier de 1965 à 1970)

DB : Vous avez commencé votre carrière musicale chez Pye Records, puis vous avez continué chez Vertigo. Qu’en est-il aujourd’hui?
FR
: Hé bien, cela fait déjà un moment que j’ai mon propre studio d’enregistrement. Parfois, on produit nous-mêmes nos disques, et parfois nous ne nous occupons de rien et c’est alors d’autres personnes qui s’en chargent.

DB : N’avez-vous jamais songé à produire d’autres groupes?
FR
: Pour l’instant nous ne nous occupons que de nous-mêmes. Et puis, comme tu le sais, vendre des disques, est une activité qui est en voie d’extinction. Alors c’est vraiment compliqué de savoir de quoi l’avenir va être fait et s’il faut ou non produire d’autres groupes.

DB : Question plus perso. As-tu le temps d’écouter de la musique, chez toi?
FR
: Franchement,…non. Je n’ai pas vraiment le temps d’écouter de la musique. Je joue beaucoup de guitare, et j’ai toujours de nouvelles mélodies sur lesquelles je dois travailler. En ce moment, par exemple, je viens de m’acheter un nouvel ampli et je dois jouer davantage encore, car il faut que je m’y habitue. Donc je bosse…! Et c’est vrai que je n’écoute pas souvent de musique, sauf parfois après un concert… J’aime bien, par exemple, écouter les violons dans les valses de Strauss. Je trouve cela très apaisant après les tensions d’un concert. Cela permet d’évacuer l’adrénaline. Sinon, je suis toujours en train de penser à de nouveaux arrangements possibles, ou à de nouvelles paroles de chansons.

DB : Quelle est la chanson célèbre que tu aurais aimé composer et qui n’appartient pas à ton répertoire?
FR
: Oh, il y en a tellement que j’aurais aimé composer moi-même. Comme ‘Simply the Best’, peut-être, ou bien ‘The Last Resort’, la dernière chanson qui se trouve sur l’album des Eagles où l’on trouve ‘Hôtel California’.

DB : Et côté albums…?
FR
: (silence) Franchement, Dominique, pourquoi voudrais-tu que je te parle de disques qui ne viennent pas de moi…? Parce que je suis plutôt content d’avoir fait tout ce que j’ai fait. Et je n’envie rien de ce qu’on fait les autres, mais si t’insistes, et en parlant d’un point de vue financier, par exemple, c’est vrai qu’Hôtel California est une très, très belle réussite. Mais c’est curieux que tu me demandes quels morceaux j’aime d’autres que moi… Je n’avais jamais pensé devoir répondre à cela et je ne sais même pas si un jour quelqu’un me l’a déjà demandé…(rires).

DB : C’est bien pour cela que je t’ai posé la question. Tout comme je pourrais te demander quels sont les artistes actuels que tu apprécies en ce moment…
FR
: J’aime beaucoup Muse, mais il y a plein de groupes que j’apprécie mais dont je ne retiens pas spécialement le nom…

DB : Dans quel état d’esprit te trouves-tu, en ce début de nouvelle décennie de ce nouveau millénaire?
FR
: Je suis globalement dans le même état d’esprit que j’ai toujours eu. Je suis toujours heureux de faire ce que je fais, qu’il s’agisse de la prestation d’hier, de celle de ce soir ou de celle de demain soir. Ce qui importe toujours, c’est de jouer, et quel que soit le lieu. Par exemple, prochainement nous allons jouer dans un stade de Zurich, mais pour moi ce n’est pas plus important de jouer dans un grand stage que dans une petite salle. Sinon, il y a quelque chose qui n’irait pas! A partir du moment où tu joues devant un public, tu te dois de donner le meilleur de toi-même, vraiment le meilleur de toi-même. D’ailleurs partout où nous jouons, les gens disent que c’est génial. Et la plupart du temps, nous pensons, nous aussi, que c’est génial…! C’est quand même bien d’être sur la même longueur d’onde.

DB : Question piège… Est-ce que tu te rappelles le nombre de chansons que tu as composées?
FR
: Non! Je suis désolé, mais très franchement je ne m’en souviens pas. Je serais même tenté de te dire que je n’en ai pas encore assez écrites (rires). Le besoin et la satisfaction de composer sont restés intactes au fil du temps. J’aime composer, car cela me donne l’impression d’être toujours amoureux. Et si j’écris des mélodies qui sont faciles à mémoriser, que les gens retiennent, qu’ils savent fredonner parce qu’ils les aiment, cela me rend heureux! Très heureux…!

DB : Et quelle est ta relation avec le Blues?
FR
: J’aime bien le blues. Je préférais cette musique lorsque j’étais plus jeune, mais je n’arrivais pas à bien la jouer. Mais tu sais aussi qu’il y a tellement de choses que l’on englobe sous l’appellation Blues, comme tant de guitaristes qui sont étiquetés blues, et il est parfois difficile de faire la part des choses. Pour moi, le blues ce n’est pas une question de performance technique, mais plutôt une question de feeling. Le meilleur groupe de blues peut surgir de n’importe où, n’importe quand. Peu importe depuis combien de temps il joue et comment il joue. Ce qui importe vraiment, ce sont les sensations qu’il fait passer, ce qu’il transmet aux spectateurs. Parfois, dans des festivals de blues, tu peux voir jouer des dizaines de formations qui font toutes la même chose, mais il leur manque cette petite étincelle qui fait justement toute la différence avec le reste. En fin de compte, le blues c’est vraiment quelque chose qui n’est pas aussi simple que ce que l’on pourrait croire, car ce n’est pas donné à tout le monde de parvenir à faire passer la fameuse petite flammèche qui change tout…!

Francis Rossi