ITW de Chris Birkett

                  ITW de Chris Birkett

 


Préparée et réalisée par Frankie Bluesy Pfeiffer

Mars 2010 – Pendant la résidence tournée de Chris Birkett aux Déchargeurs (Paris)

Photos : © Frankie Bluesy Pfeiffer
                                                                                               
 

Autant le bonhomme est discret, autant son CV est impressionnant. Autant il vous dira les yeux illuminés qu’il sort son second opus, autant savoir qu’il ‘pèse’ cent millions de disques ne le fait pas vibrer plus que ça. Car le nom du mec figure sur tellement d’albums célèbres, de Sinead O’Connor à Buffy Sainte Marie en passant par Alison Moyet, Dexys Midnight Runners, The Pogues, Talking Heads, Bob Geldof, Mel Brooks, Mango Groove, Siedah Garrett, Thomas Dolby, Steve Earle,…que si l’on alignait, posés sur la fine tranche de 1cm, tous ces CD l’un derrière l’autre, vous pourriez parcourir trois fois la distance Paris-Londres, ou bien, pour ceux qui y croient encore, et j’en connais, la distance Paris-Loch Ness (au nord de l’Ecosse). C’est vous dire que le lascar est une pointure, et même plus qu’une pointure, un ‘nom’. Un nom qui, pour la seconde fois, passe de l’autre côté de la rampe, du côté des projecteurs, avec ce second album au titre reposant, ‘Freedom’.

C’est cette pointure, ce nom qui eut pour mentor Tony Visconti (David Bowie, T. Rex, Moody Blues,…) que nous avons rencontré pour vous.

 

FP : Alors Chris, raconte nous cette première guitare, faite de tes mains, à 8 ans?
CB : J’ai fait cette guitare à partir de bouts de bois que j’ai trouvés ici et là, et les cordes provenaient d’un vieux banjo qu’un copain avait. Cela avait un son entre le banjo et la Chinese Pipa.

FP : Pourquoi une guitare et pas une batterie, ou le chant?
CB : Je ne sais pas, car j’ai commencé par la batterie. Et j’ai toujours eu plein de problèmes à l’école car je n’arrêtais pas de taper et de pratiquer la batterie sur mon pupitre, en classe.

FP : Quelles étaient tes influences musicales, à cet âge-là?
CB : Chet Atkins, Les Paul, The Shadows, tout ce qui avait beaucoup de guitare. Et un jour, j’ai vu Deep Purple jouer dans mon école, avec Richie Blackmore à la guitare, et là, j’ai été scotché. Et comme Richie venait de là où je venais, un peu plus tard je suis allé prendre des cours de guitare avec celui qui fut son prof., Big Jim Sullivan.

FP : Tu as grandi dans un univers pas très aisé, pourrions-nous dire…
CB : Oui, j’ai grandi dans un milieu très difficile, vraiment très difficile. Le genre de milieu où si tu n’as pas une énorme volonté, tu peux faire plein de bêtises. La plupart de mes copains ont eu plein de pépins, et certains ont fini en prison. Je me sentais mal, d’ailleurs, car je n’aimais pas aller avec eux pour se bagarrer ou casser ce qu’ils trouvaient. Moi, je préférais rester à la maison et écouter des disques des Beatles, des Stones, de Rory Gallagher, de Deep Puprle et Led Zeppelin,…et ensuite d’essayer de rejouer chaque solo de guitare. C’est ce qui m’a évité de plonger dans ce milieu très dangereux dans lequel vivaient mes copains.

FP : Tu joues alors dans ton premier groupe, à 14 ans…
CB : Mon premier groupe s’appelait ‘Friends of Fernburg’. Fernburg, c’est l’ancien nom de la ville où j’habitais, Farnborough. J’étais terriblement motivé par ce groupe, mais les autres l’étaient beaucoup moins. Pour moi, c’était ‘le’ moyen de me sauver de ce monde pauvre et misérable dans lequel je vivais.

FP : Vous jouiez quoi?
CB : On jouait des chansons des Beatles, de Free et de Rory Gallagher, mais aussi des compos. On est restés ensemble quelques années, sans jamais passer professionnels. En fait, j’étudiais l’électronique pendant la journée et le soir, la nuit, je jouais dans des clubs, et, du coup, je ne dormais pas beaucoup. Mais finalement, bien des années plus tard, tout ce que j’avais donné de moi pour suivre ces études d’électronique m’a beaucoup servi. Pour te donner une idée, j’ai construit quatre studios d’enregistrement.


FP:
Que retiens-tu d’autre de positif, de ces années?
CB : Je n’ai pas vraiment de souvenirs positifs de toutes ces années. J’étais presque comme un orphelin car je n’ai jamais connu ma mère. Elle est partie lorsque j’avais trois ans et je voyais très peu mon père, qui était chauffeur routier. Mon seul souhait, pendant toutes ces années, était de partir et de devenir musicien professionnel. C’est ce qui m’a sauvé et maintenu en vie, d’une certaine manière.

FP : Tu rejoins ensuite les Montana Dogs à 21 ans, pour 18 mois de tournée. Comment cela s’est-il passé?
CB : De manière très simple et très étonnante à la fois. Je travaillais de nuit dans une station service de Peckham, au sud-est de Londres, et le bassiste d’un groupe qui s’appelait Montana Red Dog, à qui on avait parlé de moi, est venu me voir à deux heures du matin, à la station service, et il m’a dit qu’il avait besoin d’un guitariste pour une tournée de 18 mois et tout de suite, le groupe devant partir dès le lendemain pour l’Allemagne. Il fallait donc que je prenne une décision immédiatement. J’ai quitté mon job à sept heures du mat’, au moment où le patron de la station service est arrivé, et je suis parti avec le groupe pour l’Allemagne.

FP : Qu’as tu retenu de ces 18 mois de tournée?
CB : J’ai appris énormément de choses pendant cette tournée. On a joué pour des militaires, sur les bases de l’OTAN et en écoutant de la musique sur les juke box des bases militaires j’ai découvert des gens comme James Brown, The Ohio Players, The Commodores, Tower of Power’, des trucs que je n’avais jamais entendus en Angleterre. Au cours de la tournée on est devenu le groupe de R’n’B/Soul le plus populaire d’Allemagne et les concerts devenaient de plus en plus excitants. A tel point que j’ai commencé à assurer les vocaux en plus de notre chanteuse afro-américaine. Et puis, pendant cette tournée, l’agence pour laquelle on bossait, nous a fait jouer comme ‘backing band’ pour des artistes américains et c’est comme ça que j’ai joué pour Rufus Thomas, Ann Peebles, Jean Knight et King Floyd, par exemple. C’est aussi à cette période-là que j’ai croisé la route de Rod Temperton, qui était dans un groupe appelé ‘Johnny Wilders Chicago Heat Wave’. On a pas mal joué avec eux, avant qu’ils ne raccourcissent leur nom en ‘Heat Wave’ et signent un hit énorme avec ‘Boogie Nights’. Rod Temperton a ensuite écrit pour Michael Jackson, dont des chansons pour l’album ‘Thriller’.

FP : De ton côté, toi, tu intègres ensuite ‘Love Affair’…
CB : J’ai rejoint Love Affair quelques années après qu’ils aient produit ce hit, ‘Everlasting Love’.

FP : Pas trop déçu d’être arrivé après le hit?
CB : Non, parce que moi aussi j’ai eu un hit, avec mon propre groupe, Cry Sisco, et la chanson ‘Affro dizzi act’. Donc aucun regret par rapport à ça, tu vois…(sourire). C’était d’ailleurs marrant de l’entendre à la radio. Il m’est même arrivé de me balader dans Londres et d’entendre ma chanson qui était jouée dans une voiture qui passait près de moi. Et puis ensuite, j’ai eu plein de hits en tant que producteur et ingénieur du son, comme ‘Geno’, des Dexys Midnight Runner, ou ‘Nothing Compares 2 U’ de Sinead O’Connor. Ces hits m’ont apporté la même satisfaction que ce premier hit que j’avais eu comme musicien.

FP : Avec ce groupe, Love Affair, tu as partagé la scène avec Led Zeppelin… Ca s’est passé comment, et où?
CB : Ca s’est passé sur l’ile de Guernesey, quelque part entre l’Angleterre et la France. Led Zeppelin y était pour les mêmes raisons que nous, parce que cette île était un paradis fiscal. On y a joué dans un club pendant 3 mois et chaque soir, les mecs de Led Zep sont venus nous voir et ont jammé avec nous.


FP: Tu as donc joué avec
Jimmy Page et Robert Plant ?
CB : Oui, j’ai joué avec tous, pas seulement avec Page et Plant. J’étais d’ailleurs un grand fan de John Bonham. C’était mon batteur favori. A l’époque j’avais une Fender Stratocaster de 1959 que j’avais modifiée, et Jimmy Page adorait ma guitare. En fait, j’avais bricolé un pré-amp dans la guitare pour booster mes solo. C’était sans doute la première guitare ‘active’ connue comme telle. Quelques temps plus tard j’ai rencontré Rory Gallagher qui a aussi été très impressionné par ma guitare.

FP : As-tu gardé des relations avec les membres de Led Zep?
CB : Malheureusement non. En fait c’était une période un peu folle que l’on vivait, où tout le monde se croisait, jouait ensemble, puis repartait dans d’autres directions, sans se poser de questions. Pour nous, à l’époque, le plus important était de jouer, jouer, jouer.

FP: Mais finalement, ces tournées, n’est-ce pas un épisode de ta vie qui se termine quand la tournée se termine?
CB : Tourner est une expérience étrange et étonnante en même temps. Il y a un tel niveau d’excitation pendant que tu tournes qu’il est très difficile de retourner dans une vie routinière après une tournée. C’est sans doute la même chose qui doit se passer dans la tête d’un soldat qui revient chez lui après la guerre…

FP : Tu rencontres ensuite Tony Visconti. Comment vous êtes-vous rencontrés?
CB : C’est le bassiste de Love Affair qui m’a parlé d’un nouveau groupe appelé Omaha Sheriff, qui allait signer un contrat avec la maison de disque Good Earth Records de Tony Visconti. Ils cherchaient un guitariste pour faire leur premier album. Je suis allé à l’audition et j’ai décroché le job. On a enregistré l’album dans le studio de Tony, à Shepherds Bush (Londres) et sur notre premier single, ‘Come Hell Or Water High’, on avait même le London Symphonic Orchestra. A cette époque, Tony produisait David Bowie et Marc Bolan – T. Rex.

FP : Quel relationnel avait-il avec les musiciens ?
CB : Tony avait le don de s’adapter à tout univers, à tout environnement musical quel qu’il soit. C’était non seulement un grand producteur, mais c’était aussi un excellent arrangeur pour les cordes. Il avait l’âme d’un musicien et savait comment communiquer avec n’importe quel artiste, de manière intuitive. J’ai appris à être comme lui pendant l’enregistrement des deux albums qu’il a produits pour mon groupe. C’est d’ailleurs lui qui joue de la basse sur deux titres de mon dernier album, ‘Freedom’, avec toujours cette même flamme qui l’habite.

FP : Qu’est-ce qui t’a attiré vers Tony?
CB : Sa manière de faire ressortir le meilleur d’un musicien. Et puis c’est aussi un excellent ingénieur du son.


FP : Et toi, alors, pourquoi avoir ainsi laissé tomber ta face ‘musicien’ pour celle de ‘technicien du son’?
CB : Je n’ai jamais arrêté d’être musicien, et je le suis toujours, même pendant toutes ces années où j’ai été ingénieur du son puis producteur-arrangeur. En fait, mon succès en tant qu’ingénieur du son, je le dois au fait que j’ai été musicien. Mes connaissances en électronique étaient importantes, c’est sûr, mais avoir été musicien est un plus énorme. Peut être même essentiel. Tu ne peux pas saisir le flux d’énergie des musiciens si tu ne l’as pas vraiment vécu toi-même. Que tu sois d’un côté ou de l’autre de la vitre, cela n’a plus d’importance puisque tu peux être des deux côtés. C’est la même chose dans de nombreux domaines, comme dans ce que tu fais, Frankie. Avoir été musicien te donne incontestablement un plus que d’autres n’ont pas, et le fait de sentir les musiciens, la manière dont ils jouent et transmettent leur énergie est essentielle. C’est ce qui a fait la différence entre Tony Visconti et beaucoup d’autres.

FP : N’est-ce pas frustrant de ne plus être dans la lumière des projecteurs?
CB : (sourire) Oui et non. C’est vrai qu’à certains moments j’ai ressenti comme de la frustration, surtout quand l’artiste avec lequel je travaille ne montre aucun respect pour ce que je fais, mais je vais te dire une chose, vois-tu, c’est que ceux qui m’ont posé le plus de problèmes ou m’ont le moins respecté étaient les moins bons, si ce n’est les plus mauvais. Par contre, oui, j’ai travaillé avec des gens fantastiques, et qui eux, sont devenus de grands noms de la musique, comme Buffy Sainte Marie, Sinead O’ Connor ou Bob Geldof. Des personnes qui non seulement ont du talent mais savent reconnaître et saluer celui des autres, et ça, vois-tu, c’est quelque chose qui se ressent au travers de leur musique. Ce sont des artistes ouverts vers les autres et qui n’ont pas de problème d’égo, car pour eux, la musique ne vient pas d’eux mais passe par eux. Ils se sont mis au service de la musique. Et lorsque tu es ‘au service de’, tu n’as plus de problème d’égo et cela fait toute la différence.

FP : Tu es toujours en relation avec certains artistes, comme Buffy Sainte-Marie. N’est-ce pas aussi parce que tu es, tout comme moi, d’ailleurs, d’une ancienne génération?
CB : Non, je ne pense pas, parce que les nouvelles et les anciennes générations ont les mêmes aspirations, celle de créer et de diffuser leurs créations. Et cela, finalement, dépasse toute notion de génération, et d’âge.
 

FP : Parmi tous les artistes avec lesquels tu as travaillé, avec lesquels as-tu eu ce déclic, ce quelque chose de plus qui transforme une relation professionnelle en relation amicale, humaine?
CB : Buffy Sainte-Marie, Tony Visconti, The Makumbi Orphan Choir, Etran Finatawa, Sierra Maestra (Buena Vista Social Club), Talitha Mackenzie et pas mal d’autres encore, mais ce serait trop long de te les énumérer tous…

FP : Et parmi les artistes français?
CB : Ali Amran, Sarah Eden, Marc Berthoumeux et Andre Ceccarelli.

FP : Pourquoi t’être installé en France, en 93?
CB : Bonne question, Frankie. En fait, j’étais à la croisée des chemins, dans ma vie. A Londres, je bossais comme un dingue et je ne voyais que rarement mes enfants. Un jour, je suis rentré d’Afrique et je les ai entendus appeler mon ingé-son ‘Papa’. J’ai compris que je ratais quelque chose de très important dans la vie: voir ses gosses grandir. J’ai donc décidé de quitter Londres et de recommencer une nouvelle vie en France. J’ai acheté un vieux château situé près de St Emilion et j’y ai construit un studio. Ainsi je pouvais travailler tout en étant à la maison, bosser avec mes amis musiciens et avoir ma famille près de moi.
 


FP : Mais pourquoi Bordeaux et pas Paris?
CB: En fait, j’étais déjà venu en vacances sur Bordeaux et j’aimais le climat et l’air de cette région.

FP : Alors pourquoi avoir voulu repasser de l’autre côté, dans les projecteurs à nouveau, en 93, avec un premier album, ‘Men From The Sky’?
CB : Parce qu’après avoir travaillé sur le hit de Sinead O’Connor j’avais décidé de prendre du temps pour moi et de travailler sur mes propres compos. Je te l’ai dit, j’ai commencé comme musicien et je n’ai jamais cessé d’être un musicien. J’ai donc fait un break de quelques mois et j’ai enregistré mon propre album, ‘Men From The Sky’, qui était inspiré par tous mes voyages autour de la terre et toutes ces cultures dans lesquelles j’ai été immergé. Chaque morceau, chaque chanson de cet album a l’empreinte d’un des lieux que j’ai visités. Une fois que j’ai eu fini ce disque, je l’ai fait écouter à Ed Bicknel, le manager de Dire Straits et il m’a dit que c’était sans doute l’un des meilleurs albums qu’il ait entendu depuis des années. Il a pris immédiatement le téléphone et m’a arrangé un RV avec Polygram. Ils ont tout de suite signé pour le single ‘Where Do We Go From Here?’ et un EP 3 titres.

FP : Ce titre, ‘Where Do We Go From Here?’ a été intégré dans l’album ‘One Voice, One Love’. Comment cela s’est-il fait?
CB: Très simplement. J’avais rencontré Sam Hutton, une femme qui travaillait pour Care International et qui cherchait un moyen de lever des fonds pour l’Afrique. Elle m’a demandé si elle pouvait mettre ma chanson sur la compilation qu’elle voulait sortir, ‘One Voice, One Love’ et j’ai dit oui tout de suite. Toutes les royalties de cet album sont allées à Care International et je suis très fier d’avoir pu contribuer ainsi à aider cette organisation.

FP : Après une telle reconnaissance, pourquoi t’être ensuite tu à nouveau pendant 17 ans?
CB : Tout simplement parce que j’ai eu trop de travail. Je n’avais plus une seconde à moi pour faire de la musique, ma musique. Souvent je n’avais même pas de temps pour dormir, tu imagines… J’ai par exemple travaillé avec Malcolm McLaren et il m’est arrivé de travailler 48 heures sans m’arrêter et sans dormir.

FP : N’était-ce pas aussi parce que tu avais été déçu de l’accueil réservé à ce premier CD?
CB : Oui, aussi, mais je n’ai pas eu, ou pris le temps pour le promouvoir et tourner, car même si beaucoup de gens dans le business étaient intéressés par l’album, je ne me suis pas totalement investi pour le promouvoir.
Mais ça, vois-tu, te le sais plus tard. Et tu le regrettes après. J’avais, par exemple, signé avec le label ‘Mega Records’, qui distribue dans les pays scandinaves, je suis allé faire des radios, des ITW, mais je n’ai pas tourné, et ça, vois-tu, c’est mon principal regret par rapport à cet album.

FP : Et après?
CB: Après, j’ai enregistré un autre album, dans les années 90, mais je ne l’ai jamais sorti. Pourtant j’avais commencé à faire des concerts pour le promouvoir et il m’est arrivé de jouer devant 10.000 personnes à Bordeaux, comme pour la victoire de la France en Coupe du Monde de football, en 1998. J’étais devenu une des têtes d’affiche sur Bordeaux et je jouais avec The Pogues comme avec Zazie.

FP : Pourquoi avoir attendu alors 17 ans pour sortir un nouvel album, car 17 ans c’est une vie, presque.
CB : Pour moi, il fallait que cela mature et que je trouve la ligne. Cela peut prendre des années, une vie, pour la trouver, pour être sûr que c’est vraiment sa ligne. J’ai beaucoup travaillé pendant toutes ces années, et pour tout te dire, je pense que je dois avoir près de 300 chansons en réserve sur lesquelles j’ai travaillé. Tu vois, ce nouvel album est inspiré par le fait que j’ai ouvert mon cœur à moi-même et à une femme dont je suis tombé amoureux. La majorité des chansons parlent de cette transformation, à l’exception de celle qui a donné son nom à l’album, ‘Freedom’. J’avais composé cette chanson quand j’avais 25 ans, au piano, et je n’ai jamais su comment la présenter, jusqu’à ce que j’arrive à Paris, suite à une séparation très difficile après 25 ans de mariage. Et là, d’un seul coup, la chanson a pris toute son importance pour moi et j’ai finalement compris ce que j’avais écrit bien des années auparavant.


FP: Et sortir ce second opus 17 ans plus tard, n’était-ce pas un moyen
de te rassurer?
CB : Non, car actuellement c’est peut être la première fois de ma vie que je ne me sens pas le besoin d’être rassuré et que je crois totalement en moi.

FP: Cet album n’est-il pas finalement une forme de thérapie, pour toi?
CB : Pour moi, toutes les musiques sont une thérapie, et plus spécialement quand je compose ou quand je joue. J’ai appris à aider les autres autant que moi en jouant simplement de ce tambour ancien que l’on nomme ‘Native American drum’ et en chantant. Ca, c’est de la thérapie.

FP : Ce qui a changé, en toi, en 40 ans?
CB: Aujourd’hui, je sais exactement ce que je veux, et comment l’obtenir. Quand j’étais jeune, j’étais plein de rêves mais sans savoir comment les réaliser.

FP : Quelles sont les personnes les plus marquantes que tu as rencontrées?
CB : (sourire) La liste est longue, très longue, très très longue, surtout que toutes ne sont pas des musiciens. Certaines sont des personnes dont j’ai beaucoup appris, et d’autres m’ont aidé à m’épanouir comme personne humaine. Mais puisque tu insistes, voici ce que pourrait être ma short list: Tony Visconti, Buffy Sainte-Marie, Thomas Dolby, Led Zeppelin, Rory Gallagher, Rufus Thomas, Ann Peebles, Basil Tilley, Cythara-Martine Gercault,…

FP : Parmi tous les disques auxquels tu as contribué, quels sont les deux ou trois albums dont tu es le plus fier?
CB : Il y a 'Come Hell Or Waters High', par le groupe Omaha Sheriff, 'Long Fingers In The Soft Rain', toujours par Omaha Sheriff, 'Men From The Sky’ et 'Freedom', de Chris Birkett.
J’aime tout particulièrement ces albums parce que j’y étais totalement impliqué. Sinon, il y a aussi 'Introducing Etran Finatawa', de Etran Finatawa, un album que j’ai fait dans mon studio,  à Bordeaux, et qui m’a introduit aux musiques Touareg et Wadabi’, tout comme 'Aki D'amour', d’Ali Amran, m’a conduit à la musique berbère. Et puis il y a 'Copperhead Road', de Steve Earl, un album qui m’a fait pénétrer dans l’univers des auteurs-compositeurs de country rock music.

FP : Et parmi ceux sur lesquels tu n’as pas travaillé, lesquels aurais-tu aimé réaliser?
CB : Sans hésiter, 'Travelogue', de Joni Mitchell, un superbe album proposé par une superbe artiste, et puis aussi 'Music Of My Mind' et 'Talking Book' de Stevie Wonder, deux albums de musique inspirés par l’âme. Sans oublier 'In The Slot', de Tower Of Power, avec ses groove assassins et des arrangements exceptionnels, et….presque tous les albums de Led Zeppelin.

FP : Et maintenant, Chris, après ce second album, allons-nous devoir attendre encore 17 ans avant le suivant?
CB : Non, certainement pas! Je bosse déjà sur les chansons du prochain album car je n’ai plus de temps à perdre. Je suis monté dans le train express de la créativité car je sais pourquoi je suis ici et je n’ai plus envie de perdre du temps. On se reverra donc très bientôt, Frankie…!

 

 
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Chris Birkett