Interview de Térez Montcalm (ITW en FR)

Le nouvel album de Térez Montcalm sortira en février et nous avons déjà eu l’occasion de l’écouter. Avec cet album Térez Montcalm confirme qu’elle est un des plus grandes interprètes actuelles, reprenant des titres des années ’60 et ’70 en français et en anglais, un album fascinant dans une ambiance soul/ funk/ pop.

Thierry: Terez, bonjour! Vous êtes certainement une des artistes vocales les plus intéressantes dans le monde du jazz, vous reprenez souvent des titres d’autres artistes, que vous vous appropriez avec passion, et comme vous êtes aussi musicienne, on peut parler à chaque fois de “réécriture”. Pouvez-vous nous expliquer comment vous choisissez un titre, et votre façon de travailler autour de ce titre?

Térez Montcalm: C’est effectivement  un peu devenu une technique très personnelle et on me pose souvent la question! C’est un peu comme une re-création. Déjà, il faut dire que je trouve qu’il y a un bon nombre de chansons qui sont tellement bien écrites et composées qu’il serait difficile de faire mieux, ce sont des standards qui ne vieillissent pas, et que l’on peut tout simplement ré-adapter, mettre à sa patte en quelque sorte. Ces chansons qui ont déjà une histoire méritent d’aller encore plus loin. Et il y a tellement de belles chansons, je dois dire que j’ai le choix! En revanche, ensuite il me faut trouver l’idée, l’inspiration, et je peux passer plusieurs jours à chercher comment “twister” une chanson , et si je ne trouve pas quelque chose qui me plaise je prends une autre chanson!

Thierry: Vous semblez attacher une grande importance à conserver les mêmes musiciens pour les séances d’enregistrement, certainement de création également. Pouvez-vous nous les présenter et nous dire ce que vous apportent ces musiciens?

Térez Montcalm: Je  joue effectivement depuis longtemps avec le guitariste Jean Marie Ecay, il est exceptionnel et surtout très polyvalent. Quand je l’ai vu la première fois sur scène, il accompagnait Claude Nougaro, une de mes idoles. Mais il a accompagné également Didier Lockwood, Richard Galliano et beaucoup d’autres. Avec les années je lui ai fait de plus en plus confiance, une grande complicité est née entre nous et il est un peu devenu mon directeur musical.
Je connaissais le bassiste Laurent Vernerey depuis longtemps et nous avions déjà joué ensemble, et pour ce nouvel album avec un son plus blues, plus R&B je voulais m’entourer de musiciens différents. Laurent , comme Jean Marie, à tout de suite compris ce que je cherchais.
Ils m’ont ensuite présenté Nicolas Viccaro, qui est très talentueux, et tous les quatre nous formons, je pense, une bonne équipe.

Thierry: Le fait d’être une artiste canadienne et donc de fait, biculturelle, vous permet de voyager musicalement entre le français et l’anglais avec la même aisance. Quel est selon vous l’influence de cette bi-culturalité sur votre art?

Térez Montcalm: Simple! Je suis née à Montréal avec un père anglophone de Toronto et une mère francophone de Montréal, donc je suis déjà  bi-culturelle de naissance! Et j’ajoute que Montréal est une ville déjà bi-culturelle, moitié anglais, moitié français… Ensuite, c’est vrai que mon père écoutait beaucoup de musique anglophone, notamment du Jazz, et ma mère toute la grande chanson française, mes frères eux écoutaient du rock! Du coup, j’ai vraiment baigné dans toutes ces influences. On dit que je suis la plus Rock des chanteuses de jazz ou la plus Jazz des chanteuses de rock, c’est vrai, je suis les deux à la fois!

Thierry: Je suis allé fouiller sur vos dates de concert, et étrangement je n’ai pas vu de concerts programmés aux USA. Est-il aussi difficile pour un artiste canadien de faire des concerts aux USA que pour un artiste français, ou est-ce une volonté de votre part de favoriser le monde francophone?

Térez Montcalm: Je pense que c’est difficile car le Jazz vient des Etat-Unis et que les américains sont assez protectionnistes par rapport au Jazz. Ceci dit, c’est sûrement moins difficile pour un artiste Canadien qu’un artiste Français de faire carrière aux USA, c’est sûr. On a de très beaux exemples d’artistes canadiens comme Neil Young, Céline Dion.. mais ce n’est pas évident. Si vous m’invitez, je viendrai!
J’ai enregistré un album aux USA avec Jay Newland à la réalisation, Rufus Reid et Gil Goldstein, j’ai eu le grand bonheur d’avoir Steve Williams à la batterie pour enregistrer l’album hommage à Shirley Horn, un de mes préférés, un grand moment.

Thierry: Je ne vais pas revenir sur tous les albums que vous avez déjà sortis, mais en février sort un nouvel album que nous avons eu la chance d’écouter. Pouvez-vous me dire comment vous est venue l’idée de cet album?

Térez Montcalm: Après 4 albums de Jazz j’avais envie de me renouveler, et j’avais envie de faire un album qui me ressemble plus, je ne suis justement pas seulement une chanteuse de Jazz. J’ai plusieurs cordes à mon arc… J’ai beaucoup écouté les titres de la Motown, je les écoute toujours et c’est clairement cette époque qui m’a inspiré pour cet album, que ce soit pour les covers ou pour les compos. Et je me suis dit pourquoi pas, suis ton instinct!

Thierry: Un album de plaisir où l’on retrouve par exemple votre vision de titres comme “I’ll Be There” de Diana Ross qui, dans sa version française, est traduit par “J’attendrai”. D’ailleurs ma femme qui est américaine et qui parle parfaitement le français, lorsqu’elle a entendu ce titre, a dit “c’est magnifique, c’est en quelle langue?”. C’est exactement ce qui m’arrive parfois sur des titres très bien interprétés en anglais ou la musicalité de l’ensemble passe avant la compréhension du texte. En fait, comment arrivez-vous à mettre un tel “groove” dans chaque titre?

Térez Montcalm: Version originale des Four Tops aussi et popularisée en France par Claude François! En ce qui concerne ce titre, je l’ai enregistré dans les deux langues. Les deux me tentaient et le choix était difficile à faire! C’est toujours un vrai défi de faire swinguer du Français, les mots ne sonnent pas du tout pareil, les traductions sont souvent improbables. Je pense que je me concentre sur la mélodie et que je twiste les mots de manière à ce que cela fonctionne! Sinon je passe à une autre chanson. Je suis assez perfectionniste, il faut que çà marche, que ce soit facile, sinon le public n’aimera pas!

Thierry: Dans votre prochain album vous faites revivre aussi des titres de Nancy Holloway ou des Zombies, laissant une impression de titres entendus dans votre enfance qui vous ont fascinés, et justement quelle est cette fascination, encore une fois bi-culturelle, car vous faites la même chose avec des titres en français qui vous poussent chaque fois à réécrire et magnifier les œuvres?

Térez Montcalm: Effectivement, ce sont mes influences. Je reprends des titres qui m’ont particulièrement marquée, mais je suis aussi capable de reprendre des titres que je n’ai jamais entendus avant, mais qui me plaisent. Je peux avoir un coup de foudre pour un nouveau titre et je compte aussi sur mes proches pour me faire découvrir des nouveaux titres. Pour “J’attendrai”, c’est un ami éditeur Français qui me l’a suggéré. Et j’ai tout de suite aimé et eut l’idée de la retravailler avec des arrangements différents de ceux de Claude François!
Je ne sais pas d’où me vient cette envie de ré-écrire ces œuvres… Peut-être que je n’ai pas le choix, ma voix est peut-être le fil conducteur, tellement particulière que je dois adapter les chansons à mon style de voix!

Thierry: Une des particularités de Bayou Blue Radio est de travailler, entre autre, avec beaucoup d’artistes du jazz canadien, et dans ce cadre nous diffusons des artistes comme Dominique Fils-Aimé ou encore Tina Leon, pour ne parler que de jazz vocal. Quel regard portez-vous sur ces jeunes artistes?

Térez Montcalm: Beaucoup de bienveillance. Elles chantent toutes les deux très bien et je leur souhaite une belle carrière. C’est toujours courageux de faire ce qu’on aime, de ne pas faire de compromis et de chanter ce qui nous ressemble avant tout. Et de ne pas suivre les modes qui se démodent aussi rapidement qu’elles apparaissent… Je pense que c’est très bien ce qu’elles font, elles suivent leur instinct et font de la musique qui leur ressemble.

Thierry: Ce que nous ne savons pas encore, c’est le titre de ce nouvel album de Terez Montcalm?

Térez Montcalm: “Step out”, un titre original qui parle du moment où l’on monte sur scène, qui est l’endroit ou je me sens le mieux au monde, un espace de liberté totale! On passe de l’ombre à la lumière! Et on retourne dans l’ombre après le spectacle! Mais quel kif entre les deux!

Thierry: Merci, Terez, d’avoir accepté cette interview, et nous souhaitons un très bel accueil à ce nouvel album!

Térez Montcalm: Merci Thierry pour votre intérêt, ravie que cela vous plaise et merci de cette entrevue.

Thierry De Clemensat
USA correspondent – Paris-Move
Editor in chief Bayou Blue Radio, Bayou Blue News

PARIS-MOVE, January 8th 2024

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A savoir: Cet album marque un tournant dans sa carrière professionnelle, elle a co-réalisé cet album avec Régis Ceccarelli et s’est beaucoup investie personnellement, plus que jamais, puisque c’est le premier album qu’elle a produit. Après avoir démarré chez Francis Dreyfus avec l’album “VOODOO” et 4 albums en artiste chez Universal Music France. Elle a opéré également un retour au Québec et nous avons signé une licence avec le Label Spectra Musique qui sont vraiment très concernés par l’artiste, un petit label qui travaille comme un indé au sein d’un énorme groupe (Evenko). La sortie de l’album aura lieu le 16 Février en digital partout dans le monde, et Térez sera ce jour là en concert au Québec pour fêter l’évènement.
En France, le concert de sortie d’album se déroulera à Paris au Jazz Club étoile le 8 février prochain. Reservations ICI

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