Interview de Jacques Falda, Président de “Guitare en Scène”

Interview de Jacques Falda, Président de "Guitare en Scène"

Interview de Jacques Falda, Président de “Guitare en Scène”, réalisée par Dominique Boulay pour PARIS-MOVE
Rédigée par Margaux Boulay

Le Festival Guitare en Scène constitue un événement majeur de l’actualité du Rock ’n’Roll en France. Le dernier en date a eu lieu les 11, 12,13 et 14 juillet 2019 et la programmation du prochain, les 16, 17, 18 et 19 juillet 2020 commence à s’étoffer avec, tenez-vous bien, Deep Purple, Uriah Heep, Samantha Fish, Bernie Marsden et Ben Harper & the Innocent Criminals. C’est le moment de revenir brièvement sur son histoire à travers les propos que nous avons échangés avec Jacques Falda, l’homme qui est à l’origine de cette superbe réalisation!

Paris-Move: Comment tout cela a-t-il commencé? Peut-on dire que vous étiez fan de guitare?

Jacques Falda: On va dire que j’étais plutôt fan de musique en général, et puis je suis guitariste depuis l’âge de 11 ans. C’est donc un petit peu à cause de cela que tout a commencé! C’est un peu dans ce sens-là qu’il faut aller: guitare, musique, guitariste de rock’n’roll.

Paris-Move: Guitariste professionnel ou bien guitariste amateur?

Jacques Falda: Non, non, juste guitariste amateur!! J’ai commencé à 11 ans et j’en ai 57. J’ai eu des périodes où j’ai un peu arrêté, mais bon j’ai toujours aimé cet instrument. Pour moi la guitare représente le Rock’n’roll et j’en suis fan. Comme beaucoup de gens de ma génération, on a vécu de belles années fin 60, 70’s ,80’s. On a eu les plus grands groupes et les plus belles choses. Tout s’est écrit à ce moment-là, donc on a eu la chance de vivre cela dans tous les styles: blues, rock, hard rock, heavy metal. On a tout vécu, donc. Cela constitue une énorme culture pleine de richesses incroyables!

Paris-Move: Du coup vous vous êtes dit avec deux ou trois amis, pourquoi ne pas faire venir les gens et monter un festival?

Jacques Falda: Oui, mais on était un peu plus de deux en fait. On était une bande de copains. J’avais organisé une fête chez moi et on s’est dit qu’on pourrait faire un petit festival entre potes, comme ça, et de fil en aiguille c’est devenu un festival. Ensuite cela a évolué. On s’est un peu posé et on s’est dit que ce ne serait pas juste un festival de guitare, mais plutôt un endroit où l’on voudrait que les plus grands guitaristes du monde soient là, c’est ça l’idée. Il n’y a pas que des guitares héros, mais on veut malgré tout qu’ils soient tous là, et dans tous les styles. C’est un festival qui a une thématique, la guitare, et on s’y tient! Hier soir John Butler, c’est un guitar hero, Alvin Lee qui est venu était le guitare hero par excellence! On voulait que tous les grands guitaristes viennent, mais pas que cela! Je dis cela, mais Michal Schenker est aussi un guitar hero. C’est un festival qui a une vraie thématique.

Paris-Move: Est-ce que votre politique consiste à faire venir des artistes de variété, par exemple, pour ainsi attirer plus de monde vers ce qui constitue le fondement et les bases du festival? Comme le font d’autres acteurs, qui n’hésitent pas à faire venir des artistes de variété pour augmenter le nombre de billets vendus et ainsi stimuler des secteurs pas forcément rentables à court terme?

Jacques Falda: Alors voilà, sache que pour nous, une telle pratique est juste impossible!! Ce n’est pas dans mon ADN. C’est quelque chose que je ne ferai pas, il n’est pas question de programmer pour vendre de la billetterie. Quand je programme, c’est parce que j’en ai envie. Des fois ça marche bien, des fois non, mais ce n’est pas grave, c’est une prise de risque que je fais. C’est moi qui programme et choisit les guitaristes et les formations qui viennent jouer ici!

Paris-Move: On peut déjà vous demander si vous déjà de futurs projets ?

Jacques Falda: Je reste discret et je préfère ne pas en parler, mais on a déjà des contrats signés en vue de manifestations à venir pour les années suivantes. Mais je pense aussi que quand vous avez une idée bien claire, cela limite, certes, mais cela permet également d’afficher une véritable identité. On vous écoute différemment, dans certains secteurs et cela vous permet également d’être identifié par le lieu où cela se passe et de créer du lien avec certains artistes qu’on ne pourrait pas créer autrement. Si la tournée d’adieu de Mark Knopfler passe par ici dimanche c’est parce que Mark Knopfler a demandé à venir y jouer spécialement. Ce qui est un signe de reconnaissance plutôt flatteur. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai modifié les dates du festival. En principe c’est la semaine 29, mais pour l’occasion on a un peu précipité les choses et on est passé à la semaine 28. Voilà, tel est notre spectre: c’est comme cela, c’est le nôtre!

Paris-Move: Il y a tout de même un effet bénéfique, la carte de visite qu’est la vôtre fait qu’on veut venir ici et pas ailleurs. C’est plutôt valorisant. Vous ne privilégiez pas de registre particulier de cette musique? On peut dire que c’est assez diversifié?

Jacques Falda: En termes de Blues, on est vraiment pas mal. En 2017, c’est Kenny Wayne Sheperd qui a fait sa première date de tournée chez nous quand même! Nous, on est dans tous les styles: jazz, blues, rock, heavy metal, hard rock … Tant que c’est bon! Y’a pas un style particulier. On a eu du flamenco, du jazz manouche, de tout, mais il faut que ce soit Top. Je ne veux pas faire de variété ni d’électro! Cela ne m’intéresse absolument pas!!

Paris-Move: Et au niveau du public, est ce qu’il vient principalement de Suisse ou d’un peu partout?

Jacques Falda: Le public vient de partout, aujourd’hui. Je crois qu’on est à 37% de public suisse, ce qui est vraiment pas mal. Après, cela vient de Rhône-Alpes… et de partout. Comme on est très ciblé, les gens viennent de Belgique, d’Italie, d’Espagne. On est quand même très typé, spécialisé. Les gens qui ont l’info sur la programmation prennent le temps de venir pour vivre l’évènement et écouter de ma musique. En plus on a une jauge très limitée car les grands artistes que vous voyez, vous les écoutez d’habitude avec des jauges beaucoup plus élevées, ils peuvent jouer pour des publics de plus de 50.000 spectateurs. Cela change la donne. Au HellFest avec 50.000 personne et chez nous avec 4.000 personnes ce n’est pas la même chose. On peut aller à certains événements pour retrouver une très grosse ambiance et une atmosphère particulière qui a l’habitude de régner autour de la musique. Chez nous, les gens viennent quand même pour écouter de la musique avec, quand même, un petit quelque chose en plus…

Paris-Move: Existe-t-il un syndicat des organisateurs de festival, ou est-ce que chacun gère son festival dans son coin?

Jacques Falda: Moi je suis très prêt de Montreux, ce sont des amis, alors nous avons vraiment des contacts amicaux. C’est vrai qu’il existe un syndicat d’organisateurs, en France, mais j’en suis sorti, car je m’en sortais très bien tout seul.

Paris-Move: J’ai trouvé que ce festival était vraiment ouvert à tous. Il y a des gens qui ne viennent pas seulement pour la musique mais aussi pour dîner entre amis, boire un coup. Et du coup, ca crée des liens impressionnants.

Jacques Falda: C’est tout à fait vrai! Tu vois, il y a une super bonne ambiance, il n’y a pas de bagarre, c’est super sécurisé. On peut presque dire que c’est un rendez-vous familial. Et pourquoi tout cela? Parce qu’il faut dire qu’on est assez qualitatif, le prix du billet n’est pas donné, et cela fait donc une espèce de sélection. C’est en toute connaissance de cause que l’on vient ici.

Paris-Move: Le reste de l’année, vous ne travaillez-pas sur le festival?

Jacques Falda: Non, non… Moi, le reste de l’année, je suis chef d’entreprise. Je vis avec les entreprises, et le festival nous oblige, si l’on veut rester au top du qualitatif, à sélectionner scrupuleusement les commerçants et restaurateurs qui sont installés dans l’enceinte du festival. Quand vous êtes là, vous n’avez pas le choix (toute entrée est définitive!) et donc il faut faire attention au prix et à la qualité du produit qu’on sert au client. Quand cela coince, on ne garde pas. Globalement, si vous faites le tour, tout est bon, il y a plein de choix. En fait, les gens rentrent vers 18h environ et ressortent vers 1h du matin avec l’idée que si l’on vient c’est pour que les gens puissent vivre une soirée complète: écouter de la musique, manger, boire et s’asseoir pour discuter avec des potes puis ensuite rentrer chez eux en se disant “Wahou!! On a passé une super soirée!”. Tout est très différent, les prix sont corrects et les commerçants sont sympas.

Paris-Move: Quel est l’artiste que vous n’avez pas pu faire venir que vous aimeriez avoir au programme?

Jacques Falda: Il y en a beaucoup, en fait, mais ce n’est pas vraiment que je ne peux pas, c’est plutôt que ça s’est fait comme cela. Il faut savoir que l’on a très peu d’artistes français, ce sont souvent des artistes internationaux. Et qui dit international dit aussi tournées et programmation. Alors il faut trouver le bon moment. Donc nous, on fait des offres aux artistes, et après si ça ne marche pas la première année ou la suivante, on se dit qu’une année cela pourra enfin correspondre aux dates de l’artiste en question. Si les dates s’arrêtent le 12 et que pour nous c’est le 17, c’est comme cela. Pour les français c’est plus faisable, mais pas pour les internationaux. On travaille sur des artistes qu’on n’a pas aujourd’hui mais qu’on aura un jour ou l’autre…

Voilà l’échange que nous avons eu avec Jacques, qui a eu la gentillesse de s’arrêter un peu dans son timing hyper serré pour nous présenter en quelques mots en quoi consistent les missions d’un Boss de Festival. Et pas de n’importe lequel… Guitare en Scène, un festival qui fait, chaque année depuis 2007, de la guitare la Reine de la fête.
Ce qui explique immédiatement la diversité des différentes programmations qui se sont succédées depuis l’année de naissance de cette grande messe païenne qui fait de plus en plus d’adeptes et de fidèles. Tantôt en juillet, août ou septembre, le pourquoi de ces changements s’expliquant à la lecture de cette interview réalisée. Ce rassemblement d’amateurs de musique et de guitare se limite précisément à 5.500 spectateurs/soirée parce que c’est justement une fête de l’instrument et de la musique, et qu’il ne s’agit surtout pas de voir la quantité prendre le pas sur la qualité. Maître mot de toutes les parties qui font de ce festival un événement unique qui se déroule dans l’hexagone!
Les plus grands y sont venus, soit à la demande du programmateur, Jacques Falda lui-même, soit parce que c’était un privilège pour eux que de participer à ce rassemblement de très gentils amateurs. Des noms que vous pouvez retrouver sur toutes les affiches reproduites ici pour illustrer cette interview.