Evénement traditionnel réunissant les artistes ayant participé au dernier Tremplin organisé dans le cadre du festival Blues sur Seine, la soirée des Trophées est l’occasion de non seulement réécouter les musiciens qui avaient concouru en 2008 mais aussi de découvrir les premiers albums de nombre d’entre eux.
Premier à monter sur la scène du CAC Georges Brassens de Mantes la Jolie, Antoine Holler ouvre la soirée en acoustique, entouré par K-Led Bâ’Sam à la guitare et Jo Smokin’ Champ à la basse, interprétant pour l’occasion des titres de son premier opus, ‘Love in Stereo’, un excellent album sur lequel K-Led Bâ’Sam officie à la slide. Ayant troqué sa guitare acoustique pour une six cordes électrique et rejoint par Abraham Cohen à la batterie, Antoine Holler et ses deux compères prolongeront le set en alignant quelques grands standards du blues en alternance avec quelques titres de ‘Love in Stereo’, prouvant, si besoin en était, que sa victoire en 2008 et son billet pour le FestiBlues de Montréal n’étaient finalement pas une surprise mais la confirmation de la reconnaissance d’un (déjà) grand bonhomme du Blues français.
Le temps d’installer les deux planchers du duo Blackberry & Mr Boo-Hoo que déjà les deux artistes sont assis dessus et envoient leur premier titre avec une pêche d’enfer, à grand renfort de guitare et d’harmonica. Assurée par les claquements et les coups des semelles des pieds de nos deux lascars, la rythmique est fidèle au tempo imposé: diabolique. La salle est conquise, et le duo reçoit en retour une ovation à la mesure de leur prestation: énorme. J’ai même vu un programmateur de salles assis dans le public demander à les rencontrer tant leur set l’avait épaté. Dommage que les garçons n’avaient pas mis à disposition du public, au bar (hé oui, l’incontournable bar du CAC !), quelques CD pour la vente car j’en connais qui seraient volontiers repartis avec le précieux sésame pour réussir leur prochaine soirée entre potes.
Mais que serait une soirée de Blues à Mantes sans l’inévitable et l’incontournable Mike Lécuyer? A la guitare acoustique ce n’est pas le classique ‘Gare du Nord’ blues auquel nous avons droit mais une chanson en hommage à J.J. Cale. Peut être le prochain hit pour les radios blues…
Troisième formation à prendre le relais dans cette soirée des Trophées, le blues-band inédit composé de Philippe Devin et Nina Attal à la guitare, Bala Pradal aux claviers, Fred Baker à la basse et Abraham Cohen à la batterie. Une formation dans laquelle chacun des deux guitaristes exprima son jeu, son toucher, avant de laisser un grand Bala Pradal faire chauffer touches noires et blanches de son clavier. Dommage que K-Led Bâ’Samavait déjà dû quitter le CAC, car imaginez ce qu’aurait donné ce trio de guitaristes… Et puis si Antoine Holler avait pu rester…. Et si…. Comme quoi, la France regorge de bluesmen de talent…!
Musicien que l’on verrait bien errer tel un loup solitaire et que nous avions très récemment entendu nous offrir, seul à la guitare électrique et dans une ambiance feutrée d’un bar du 14ème arrondissement, une version totalement improvisée et divinement sublime de ‘Foxy Lady’ de Jimi Hendrix, Eric Ter est ensuite monté sur la scène du CAC Georges Brassens, son éternelle Fender bleutée à la main, et épaulé par la rythmique en acier trempé de Shake Your Hips!.
J’en connais qui n’aiment pas le style ‘Ter’ et qui trouvent toujours à râler sur sa présence, mais j’en connais heureusement beaucoup d’autres qui aiment, et d’autres à qui j’ai fait découvrir le compositeur, le guitariste, le chanteur, et qui adorent le genre décalé du bonhomme, celui que je désignais dans la chronique de son album ‘Chance’ comme le Todd Rundgren du blues. Un Todd-Ter qui fut rejoint par Carol Ann Croft (la voix de Acoustic Soul Factory) pour entamer sur ‘Honky Tonk Woman’ un set de blues très rock dans lequel Jean-Marc Hénaux et son harmonica vinrent faire tournoyer des envolées d’un bleu étincelant.
Comme chaque année, la soirée des Trophées tournera à la jam, pour le plus grand bonheur des amateurs encore présents : Kevin Guegan (Kevin Texas Band) remplacera Eric Ter à la Fender bleutée, rejoint par le duo Blackberry & Mr Boo-Hoo, Mike Lécuyer se réservant pour ‘le’ final, l’incontournable des incontournables, le fameux ‘Gare du Nord’ blues, rejoint pour les chœurs de ce ‘classique des classiques’ du blues français par le trio Christine-Nono-Fred.
Un final que le bon Mike pensera bien être la cerise sur le gâteau,….mais il était dit que le gâteau, en ce 21 mai, serait en fait une pièce montée, Blackberry & Mr Boo-Hoo remontant sur la scène du CAC pour le plus grand plaisir des spectateurs et se lançant dans un blues-vaudou incendiaire, remettant de la sauce bien pimentée sur tout ce qui bouge, invitant les artistes encore présents à les rejoindre pour un final étourdissant. Un final endiablé qui verra un Mr Boo-Hoo véritablement habité, comme transcendé par l’événement, terminer seul, à l’harmonica et au chant, assis à la batterie. Un final fou, fou, fou, dont tous les amateurs de blues se souviendront longtemps, longtemps.
Frankie Bluesy Pfeiffer