Nous avons assisté aux deux concerts que proposait le Philipp Fankhauser Band à Bern et à Zürich, les 24 et 25 novembre 2005. Deux concerts pour lesquels Philipp Fankhauser avait renforcé son quatuor de deux cuivres (saxo et trompette).
Premier concert le 24 novembre, au Bierhübeli de Bern, et second concert au Moods, une salle qui est à Zürich ce que le New Morning est pour Paris, parfaite pour un concert de Blues endiablé et intimiste à la fois. Les deux soirs, les salles sont combles, et le grand Richard Cousins n’a aucun mal à chauffer le public. Vêtu d’une longue redingote noire, le bassiste aux dreadlocks est un phénomène à lui seul : véritable chef d’orchestre du band, il dirige et anime le groupe avec de grands mouvements de basse, provoquant et jouant simultanément avec le public.
Les trois compères le suivent à la perfection, en véritable mécanique live parfaitement huilée. En les regardant jouer ainsi, on ne peut comprendre pourquoi ce groupe ne répète jamais, et que les balances sont réduites aux réglages essentiels. Comme nous le disait Philipp, ils ont le groove ; indéniablement ils l’ont.
Les titres s’enchaînent, alternant compositions signées Philipp Fankhauser et reprises de Muddy Waters, et de Johnny Copeland, bien sûr. La playlist des deux concerts est la même, à un titre prêt, et malgré cela, certains titres sonnent différemment ; le groupe fait vivre le live. On bouge et on swingue lorsque le quatuor enchaîne Down in the Valley, puis Nobody but You. Démonstration que le Blues peut autant emballer une salle qu’un rock. On sait Philipp amoureux de rythmes lents et de slow Blues, ce qu’il démontre en alignant un superbe Who’s gonna sing the Blues for You, et un émouvant et somptueux Let me Cry.
Glissées dans le concert, trois titres du prochain album de Philipp, avant un Mojo de toute beauté qui propulse Tosho et Richard dans un explosif duo basse batterie, avant un monumental solo de batterie de Tosho, j’ai bien dit monumental, et je conseillerais à pas mal de batteurs de Blues de s’inspirer de la technique de ce grand batteur qu’est Tosho Yakkatokuo. Ovationné à Bern comme à Zürich, le groupe revient pour aligner trois titres dans un rappel qui démarre en trombe avec Members Only, puis un Pie in the Sky endiablé, avant que Philipp ne signe un Lonesome tout en douceur, pour un au revoir partagé avec le public tombé sous le charme de ce final tout en mélancolie.
Mais autant à Bern le public quittera ensuite la salle, dans le prolongement du dernier titre intimiste, autant au Moods, le public refusera de laisser le groupe partir, le réclamant par une seconde et longue ovation à laquelle répondra le band en interprétant un formidable Dock of the Bay dans lequel chaque musicien démontrera que le live est la force du Philipp Fankhauser Band.
Philipp Fankhauser sur Internet : www.philippfankhauser.com
Richard Cousins : MO NU MEN TAL !
Vous êtes des milliers, des millions, à avoir déjà entendu les lignes de basses de Richard. En écoutant 24 Nights, de Eric Clapton, par exemple, ou Too Long In Exile, de Van Morrison, ou encore Blues Summit, album signé B. B. King, ou tout simplement sur l’un des quatre albums du come back de J. L. Hooker. Car c’est bien ce Richard là que vous y entendez, l’un des bassistes de blues les plus recherchés des 90’s, et qui est venu retrouver Philipp Fankhauser en Suisse.
Musicien exceptionnel, leader du Philipp Fankhauser Band (dont Philipp en a fait son chef d’orchestre), Richard est un personnage hors du commun. Grand, sec comme un coureur de fond, fantasque et jovial, l’homme devient bête de scène dès qu’il a sa basse entre les mains. Insaisissable dans les loges comme sur scène, Richard est un fauve, un félin qui n’attend qu’une chose, bondir sur scène. Et là, vous avez droit au show made by Cousins, un grand Monsieur, qui n’est autre que l’un des co fondateurs du Robert Cray Band, avec lequel il a connu d’énormes succès dans les années 80. Lui ne vous dira rien, ou presque, des trois albums, False Accusations, Strong Persuader et Don’t be Afraid of the Dark, qui ont battu des records de vente et qui ont valu aux musiciens trois Grammy Award (! ! ! ).
Vif comme l’éclair, il se lève, va chercher une pomme, se rassoit, vous parle de la Suisse et de la neige comme s’il y avait toujours vécu, avant de vous filer entre les doigts et disparaître, telle une panthère noire, dans les loges. Pour bondir sur scène, vêtu de sa redingote en cuir noir. Et en fin de concert vous n’aurez plus qu’un mot, un seul, pour qualifier ce phénomène du blues : monumental !
Lucky Sylvie Lesemne
Frankie Bluesy Pfeiffer
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