Jazz en Nord Festival 2010-2011 – Ladies first – Part I

                     

             Jazz en Nord Festival 2010-2011 – Ladies first – Part I

Texte et photos: Jean-Christophe Baugé – www.myspace.com/deadlypix

En marge des incontournables rendez-vous d’été (Jazz à Vienne) et d’automne (Nancy Jazz Pulsations) pour les amateurs de Jazz et de ses dérivés, le festival Jazz en Nord – 24ème du nom – a la particularité de proposer sur pas moins de 8 mois (d’octobre 2010 à mai 2011) et 15 villes (Lille et ses environs) des concerts des plus grands artistes. Parmi ceux-ci, les chanteuses sont particulièrement à l’honneur. En préambule au compte-rendu complet de la ‘Nuit du Blues au féminin’ (Shakura S’Aida plus Bernadette Seacrest en guest) du 2 avril, revenons sur les prestations de Nenna Freelon et Robin McKelle dans des registres plus Jazz-Soul au théâtre Charcot de Marcq-en-Barœul.


Nnenna Freelon – le 15/10/2010

Line-up: Nnenna Freelon (chant), Miki Hamaya (piano), Wayne Batchelor (contrebasse), Adonis Rose (batterie)
Setlist: You And The Night And The Music; I Love You; Squeeze Me; Changed; Angel Eyes; God Bless The Child; Smile; The Very Thought Of You; Theme From Valley Of The Dolls; I Feel Pretty; Skylark; I’ve Got You Under My Skin; Body And Soul (rappel)

Cela fait onze ans que la grande Nnenna Freelon n’était pas revenue en France, elle qui avait naguère marqué les esprits avec une fameuse prestation à Jazz à Vienne diffusée sur M6 en 1995 (Jazz 6, de l’ineffable Philippe Adler) et des albums tout à fait remarquables chez Concord. La belle quinqua, racée et dreadlockée, toute de rouge vêtue, se révèle toujours aussi envoûtante. Epaulée par un trio au top (mention spéciale à l’excellente pianiste japonaise Miki Hamaya qui officie à New York depuis 2003), les ambiances sont tantôt poignantes (‘Changed’ et ses cassures dans la voix), tantôt groovy (‘God Bless The Child’ réarrangé avec une batterie qui claque bien). Outre Sarah Vaughan et Billie Holiday, Nnenna reprend – ou plutôt se réapproprie – du Charlie Chaplin (‘Smile’ extrait du dernier album Homefree) ou du Frank Sinatra (‘I’ve Got You Under My Skin’ au feeling binaire) avec un égal bonheur. Les soli sont savamment dosés (contrebasse plus talk-over en introduction de ‘Skylark’), tout comme les gestuelles de Nnenna qu’on jugeait trop envahissantes par le passé. L’approche résolument progressiste et multi-influences prend tout son sens sur le standard éternel ‘Body And Soul’ en rappel, qui alterne parties de piano contemporaines et digressions Reggae du duo basse/batterie. Prestation vocale époustouflante, backing band inspiré… Nnenna Freelon a vraiment tous les atouts pour réconcilier le grand public avec un Jazz d’une certaine classe.


Robin McKelle – le 25/11/2010

Line-up: Robin McKelle (chant), Sam Barsh (piano), Mike Tucker (saxophone ténor), Scott Aruda (trompette), Jeff Galindo (trombone), Reggie Washington (basse), Mark McLean (batterie)
Setlist: Memphis Blues; Never Make A Move; Mess Around; I Can’t See Nobody; Teacher, Student, Love affair; You Can Have My Husband; Angel; Until The Day I Die; Change; Fairytale; I’m Ready; Eleanor Rigby; Evil Gal Blues; Everybody Knows (rappel)

Forte du succès de son dernier album chez Sony, Robin McKelle, la rouquine à la voix rauque de Rochester (notez l’allitération), se paye le luxe en cette froide soirée de novembre de remplir le théâtre Charcot, performance assez rare pour être soulignée. Au menu: un cocktail jouissif de Rhythm n’ Blues, de Soul et de Jazz au doux parfum des 60’s. La section sax/trompette/trombone, mise à contribution d’entrée de jeu, accompagne l’arrivée de la patronne sur l’enchaînement ‘Mess Around’/‘I Can’t See Nobody’ et ne quittera ponctuellement les planches que pour quelques titres dont ‘Angel’, la ballade post-11 septembre qui demande plus de retenue. Robin, elle, niveau émotions, aime à jouer les caméléons. Elle chauffe le public à blanc en français dans le texte avant l’amusant ‘Teacher, Student, Love Affair’, file la chair de poule en modulant sa voix puissante sur ‘Until The Day I Die’, et se plie au jeu des questions-réponses avec son claviériste sur ‘Change’ dont le rythme s’emballe encore et encore. Ce dernier, sous des faux airs de Moby, manie d’ailleurs le melodica comme pas un. La setlist fait également la part belle aux reprises, toutes passées à la moulinette Motown, comme le surprenant ‘Eleanor Rigby’ des Beatles, prétexte aux soli de Sam Barsh, Reggie Washington (qui lâche pour l’occasion sa partition du regard) et Mark McLean, ou encore ‘Everybody Knows’ de Leonard Cohen, véritable feu d’artifice final d’un show sans temps mort. Rarement une standing ovation n’aura été autant méritée, n’en déplaise à certains esprits chagrins férus de Jazz vocal traditionnel qui quittent la salle en trainant des charentaises.

Jazz en Nord Festival 2010-2011 - Ladies first - Part I