Festival de blues à La Charité sur Loire

                       
                      Très bon crû 2010 à La Charité sur Loire !

Reportage : Dominique Boulay
La Charité sur Loire, août 2010
Photos : © Sylvie Cornu-Boulay

La pluie était au rendez-vous, mais les fans de blues, également. Alors pas de problème à signaler si ce n’est les modifications des emplacements pour les artistes dues à la météo et aux travaux de rénovation des édifices de cette charmante petite ville de la Nièvre.
Nouvel apprentissage de la topographie de la ville, donc, et de ses nouveaux lieux musicaux, avant le premier concert du crû 2010 dans la salle dite haute à cause de l’escalier un peu raide qu’il faut gravir pour atteindre l’endroit où vont se produire The Deans. De jeunes irlandais qui nous offrent un concert blues-rock empreint de beaucoup de fraîcheur et de spontanéité. Reprises et compositions sont interprétées à un rythme d’enfer par un trio dans lequel l’un des deux frères, Gary, est bassiste, et l’autre, Gavin, officie principalement à la Stratocaster et au chant. Le troisième comparse, Gary Deon, est le batteur de cette formation originaire de Galway, en Irlande, révélation guitare 2008 au Rory Gallagher Blues Festival.

Le même soir, dans l’intimité du Cellier des Moines, le danois Tim Lothar nous offre un billet pour un voyage dans le Sud le plus profond. Le côté caveau sied d’ailleurs parfaitement à l’atmosphère intimiste que le bluesman armé de sa guitare suscite chez les spectateurs. Avec des bayou pas si loin que ça, finalement.

C’est ensuite un concert sur la voie publique, devant le Bar du Centre, qui attire notre attention et nos oreilles. Luc Arteno, en trio, nous offre une prestation agréablement entachée de slide et de lap-steel guitare. C’est péchu et ca envoie pas mal. Une formation à suivre et à réécouter, surtout que le chanteur nous interprète son blues du gaulois en français. Un candidat potentiel au ‘Prix Paris-Move’ que notre site a mis en place en partenariat avec le Festival Blues sur Seine et qui sera remis début novembre, pendant le Tremplin de Blues sur Seine.

A cause des chantiers d’embellissement de la ville, l’endroit où les soirées avaient lieu les années précédentes est momentanément hors d’usage. C’est dorénavant à la Halle aux Grains que les deux concerts nocturnes vont avoir lieu. La première formation qui s’y produit est The Spikedrivers, dont le nom a été tiré d’une chanson de Mississippi John Hurt. A ne pas confondre avec la formation du même nom originaire de l’Ohio, qui compte le double de membres et a produit beaucoup moins de CD à son actif. Un trio composé de l’anglais Ben Tysack à la guitare, à l’harmonica et au chant, de l’américaine Constance Redgrave à la basse, à la guitare et au chant, et de l’irlandais Maurice Mc Elroy.

Ce sont ensuite les musiciens de Big Dez qui montent sur scène, en plus grand nombre que ceux qui viennent de partir sous un tonnerre d’applaudissements, même si nous sommes au regret de constater que cette année il y a moins de monde dans la salle que sous le chapiteau habituel. Sans doute un peu frustrant pour les organisateurs.
Toujours est-il que le volume des décibels est monté d’un cran et que le groupe de Phil Fernandez envahit le plateau. Autour des musiciens qui constituent le noyau dur et qui font partie de la formation depuis l’origine et l’album ‘Sail On Blues’ (en 2003) avec Phil Fernandez à la guitare électrique, Bala Pradal aux claviers et Marc Schaeller à l’harmonica, sont arrivés d’autres musiciens comme Rodolphe Dumont à la guitare, par exemple, qui était déjà présent sur l’opus ‘Night After Night’, en 2004. Depuis, un saxophone est venu en renfort et le combo en pleine forme nous propose un blues puissant, rondement joué et mené, voire peut-être même, de l’avis de certains, un tantinet trop fort… Ce qui s’est trouvé confirmé lors du bœuf qui s’en est suivi et auquel Phil est venu se joindre sur la fin.

Ensuite, je dois reconnaître que Xavier Pillac, en chair et en os, c’est quelque chose que l’on n’oublie pas. Xavier Pillac, c’est une voix et un toucher de guitare époustouflant Il chante exactement comme cela se fait dans les bars des States et son jeu de guitare doit en faire pâlir plus d’un born in the USA. Quelle claque!

Le lendemain, ce sont d’un côté les Lazy Buddies qui profitent du soleil pour nous enchanter et nous mettre en forme dès l’apéro du matin, tandis que d’un autre côté, ce sont les Hobo Blues qui s’occupent des autres matinaux du gorgeon facile.

Après le déjeuner, nous voici à nouveau au Cellier des Moines où Ragtime Manu se livre à une démonstration en 84 touches de ce qu’est le ragtime à la façon Scott Joplin. Un concert qui laissera des traces dans les esprits des amateurs qui auront pris plaisir à écouter un artiste remarquable et attachant.

C’est ensuite au tour du Xavier Pillac Quartet de nous (re)mettre sur le derrière, la redoutable mission incombant ensuite à Luc Arteno, Lazy Buddies et Hobo Blues de faire patienter le public avide des nouvelles découvertes de la soirée à venir…
C’est sous une pluie battante que nous retournons à la salle où Veronica & The Red Wine Serenaders nous plongent immédiatement dans les années 40. C’est retour vers le passé, puissance dix mille, avec tout au long du concert cette sensation que l’on pouvait recevoir à tout moment le message annonçant que les Japonais bombardent Pearl Harbour ou que la deuxième guerre mondiale a débuté.
La formation menée par Veronica et composée de Maw de Bernardi, Marcus Tonto, Alessandra Ceccala et Mauro Ferrarese nous propose une ambiance délicieusement rétro où swing et jump blues sont de la fête! Avec une prestation scénique magnifiquement menée de main de maîtresse par une Veronica dynamique et pleine d’entrain.

Un franc succès avant l’arrivée du clou du festival de la Charité qui, comme chaque année, n’est autre qu’une grande, très grande pointure du Blues. L’année dernière ce fut Mac Arnold, cette année c’est le non moins géant Big Pete Pearson!

Avec Big Pete, l’essence du Blues est revenue sur scène! L’heure est presque au recueillement dans ce moment encore un brin latin puisque le héros du festival est accompagné par des musiciens italiens. Les spectateurs à la Charité, en fins connaisseurs, constituent un public particulièrement attentionné à qui on ne l’a fait plus, exigeant et difficile à la fois. Et l’accueil réservé au vieux bluesman est à la hauteur de la qualité musicale de son show, irréprochable.

Une fois de plus, c’est la tête dans les nuages que nous nous sommes quittés en se demandant ce que les organisateurs allaient pouvoir nous proposer l’année prochaine pour faire encore mieux que cette année…

La Charité sur Loire: le genre de manifestation qui nous donne envie de prendre un an d’un coup, et d’être déjà l’année prochaine.

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine
Festival de blues à La Charité sur Loire