Concert de Johnny Winter à Bobino

                                       Johnny Winter à Bobino, le 15 mars 2010

Reportage : Dominique Boulay (Paris-Move & Blues Magazine)
Photos : © Bruno Migliano ‘Nono du Blues’ – http://www.myspace.com/nonodublues

L’hiver faisait une petite pause durant ces quelques jours qui ont vu, soudainement, la légende Johnny Winter donner un concert parisien en cette mi-mars. Un concert, croyez-moi, qui restera dans les annales et dans la mémoire des nombreux fans d’hier et d’aujourd’hui.
Première belle surprise pour moi, en ce 15 mars, la salle de ce music-hall qui est superbement relookée. Il faut dire que je n’avais pas eu l’occasion d’y venir depuis un sacré bout de temps et la surprise a été de taille. Avant cela, je m’étais arrêté dans un charmant Gasthaus, histoire de ne pas aborder l’événement le ventre vide, et je dois dire que la salle dudit restaurant bruissait déjà de nombreuses rumeurs à propos du spectacle annoncé et attendu. Le lieu en question ne devait d’ailleurs pas être le seul concerné par l’événement en ce lundi soir, car de tous les débits de boisson de la Rue de la Gaieté sortaient, peu à peu, des gens qui allaient tous dans la même direction, celle de Bobino. Je pense même que cette rue n’a pas dû voir une telle faune depuis un moment…!

Petit à petit la salle s’est donc bien remplie, à la différence du bar qui, en manque de boisson houblonnée, a envoyé des émissaires s’approvisionner dans la grande surface la plus proche. Une première partie a commencé à faire attendre les spectateurs impatients, assoiffés et curieux. C’est à un orchestre français, ‘A l’Ouest le Band’, qu’incombait cette redoutable mission et je dois avouer qu’ils se sont acquittés de la tache de manière honorable.

Après une petite pause, ce sont Paul Personne et Louis Bertignac qui entrent en scène, histoire de présenter le fameux texan de Beaumont, héros d’une tournée de plusieurs dates ‘sold out’ en France et qui s’achevait ce soir, justement.
Cela étant fait, les musiciens du grand guitariste entraient sur scène et posaient les bases de l’ambiance à venir. Puissant est le premier substantif qui vient à l’esprit. Ce seront ainsi Scott Spray à la basse, Vito Liuzzi à la batterie et Paul Nelson à la guitare qui accompagneront Johnny Winter pour un concert qui ne durera qu’un peu moins d’une heure et quart. Car comme nous le savons tous, le guitariste est quand même sensiblement ‘diminué’ par de multiples fatigues. Ceci étant dit, je n’ai aucune envie d’épiloguer sans fin sur ses quatre précédents passages à Paris ou sur sa prestation de Montereaux, dans l’Yonne, au début du vingt et unième siècle et je laisse aux esprits grincheux et tortueux le soin de revenir sur ce qui fut car ce qui importe, aujourd’hui, c’est qu’il soit là, devant nous, et qu’il tienne ses guitares pour nous interpréter ces bons vieux blues que l’on aime entendre en ‘live’.

Difficile, voire même impossible pour Johnny Winter de revisiter le répertoire de ses vingt et un albums officiels et c’est avec regret que nous n’entendrons pas certains titres, mais l’essentiel, une fois encore, est que le guitariste soit là, et bien là, face à nous.
Armé de sa Erlewine Lazer, il a joué quelques classique comme Hideway de Freddie King, She Likes To Boogie Real Low, Good Morning Schoolgirl, Black Jack, I’m Tore Down, épaulé au chant par Vito Liuzzi, Red House d’Hendrix et j’en passe…
Rien à dire côté dextérité guitaristique, car il reste les fondamentaux chez le frère Winter. Ce qui n’est peut-être pas le cas côté vocalise car il nous fallait souvent, en effet, tendre l’oreille pour ouïr le filet de voix du bon Johnny W.

Ce n’est finalement qu’au moment ultime du rappel qu’il nous a ressorti sa Gibson Firebird, histoire de nous offrir en guise d’ultime au revoir Mojo Boogie et Highway 61Revisited.
Nous étions aux anges et c’est la tête dans les étoiles que nous avons retrouvé la réalité. L’une des dernières icônes de la musique du siècle précédent, encore vivante, venait de passer par chez nous pour nous confier que le blues ‘is still alive’! Convenez avec moi que cela n’est pas rien en cette année commémorative du quarantième anniversaire de Woodstock.

En guise de souvenir de cette mémorable soirée, une carte postale de la formation était remise à chaque spectateur. Comme si cela avait pu matérialiser ces magnifiques sentiments qui nous habitaient tous en cette fin de soirée. Quitte à oublier le frêle ‘petit vieux’ qui s’en retournait, avec difficulté, dans les coulisses avant de regagner sa loge. Y’a des fois où l’on a envie de maudire ce temps qui passe, inéluctable, et qui est la vie, tout simplement.

Dominique Boulay
Paris-Move
Johnny Winter